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Un long et périlleux chemin vers la sécurité

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Un long et périlleux chemin vers la sécurité

La famille de Jean a passé presque deux ans sur la route après avoir fui la guerre en République centrafricaine. Ils ont désormais un lieu où habiter jusqu'à ce que la paix revienne.
9 Avril 2015
Trois enfants de Jean portent de l'eau jusqu'à leur nouvelle habitation dans le camp de réfugiés de Bili, en RDC.

L'histoire de Jean

Le soleil vient à peine de se lever dans le ciel congolais, mais Jean s'affaire déjà pour nettoyer le petit jardin devant sa nouvelle habitation dans le camp de réfugiés de Bili. Il m'accueille avec un grand sourire. Après près de deux ans sur la route, fuyant la violence en République centrafricaine (RCA), sa famille et lui sont enfin en sécurité.

Jean, sa femme Edwige de 29 ans, et leurs quatre enfants survivants font partie des 800 réfugiés qui se sont installés dans le camp de Bili, à la frontière nord de la République démocratique du Congo (RDC), depuis son ouverture deux semaines auparavant.

Tandis que nous nous asseyons pour discuter, Jean, 38 ans, se souvient de la date exacte - le 24 mars 2013 - à laquelle sa famille et lui ont fui pour la première fois une attaque sur Bangui, la capitale de leur pays.

« Ma maison a été détruite quand les Sélékas sont arrivés à Bangui », déclare-t-il. « J'étais là-bas. Il y a eu beaucoup d'abus et ils ont mis le feu. J'ai fui pour la première fois dans la forêt avec ma famille, 40 kms plus loin ».

Beaucoup de réfugiés de RCA empruntent des pirogues pour traverser vers la RDC. Espérant rentrer vite, ils restent souvent à proximité de la rivière, mais ils sont vulnérables aux attaques à travers la frontière.

Situé à 50 kms de la frontière, le camp de réfugiés de Bili nouvellement ouvert en RDC offre abri et sécurité à plus de 2 000 réfugiés originaires de République centrafricaine.

Géré par le HCR, le camp de réfugiés de Bili nouvellement ouvert en RDC accueille désormais plus de 2000 réfugiés originaires de République centrafricaine.

Après un mois dans la forêt, ils sont retournés à Bangui où Jean a reconstruit leur maison et prié pour que la paix dure. Mais, quelques mois plus tard, quand les combattants anti-balaka ont organisé une contre-attaque sur la ville, ils ont dû fuir de nouveau. C'était à Noël 2013.

« Les anti-balakas combattaient les Sélékas », se souvient-il. « C'était très grave. Les Sélékas sont venus chez moi. Ils m'ont emmené pour me tuer. J'ai pleuré. Je leur ai dit que je n'étais pas un rebelle. Ils m'ont blessé avec une arbalète. Le 25 décembre, j'ai réalisé que la situation était catastrophique ».

L'attaque a été tellement soudaine qu'Edwige a laissé un de leurs enfants derrière elle lorsqu'elle s'est enfuie de la maison. « La crainte des coups de feu l'a fait partir en courant et elle a oublié l'enfant pour quelques minutes seulement », explique Jean. « Les Sélékas ont tué notre enfant. Il avait deux ans. Ils ont jeté son corps ».

« Les Sélékas ont tué notre enfant. Il avait deux ans. Ils ont jeté son corps ».

Après l'attaque du jour de Noël, plus de 10 000 réfugiés de RCA ont réussi à traverser la rivière Oubangui pour rejoindre la DRC - un trajet qui prend habituellement 10 minutes en bateau. A leur arrivée à Zongo, la ville congolaise qui se trouve juste en face de Bangui, ils ont été transférés par le HCR vers le camp de réfugiés de Mole.

La famille de Jean a eu beaucoup plus de mal à s'enfuir. « Nous étions trop loin de la rivière et nous ne pouvions pas l'atteindre », explique-t-il. Ils ont de nouveau dû fuir vers la forêt, se nourrissant de feuilles et de racines pendant deux mois en évitant les attaques répétées des Sélékas. « Les enfants ont perdu beaucoup de poids », indique-t-il. « Nous souffrions… Nous n'avions aucune aide ».

Jean les a conduits à Kouango, le village de son grand-père, mais ce dernier a lui aussi été attaqué. « J'ai dit : 'Mon Dieu, où puis-je aller pour être en sécurité avec ma famille ?' »

Jean, Edwige et leurs quatre enfants survivants attendent leur tour pour être enregistrés dans le camp de réfugiés de Bili, en RDC, après avoir fui la violence en République centrafricaine.

Finalement, après des mois de fuite, dormant et se nourrissant à peine, ils ont trouvé un moyen de franchir la frontière vers le territoire de Bosobolo, situé dans la province de l'Equateur en RDC, à plus de 400 kilomètres en amont de Bangui.

« Nous avons pris une pirogue », explique Jean. « Mais nous avons failli avoir un accident parce qu'il y avait trop d'enfants à bord. Nous avons imploré Dieu. Nous avons perdu quelques vêtements. Nous sommes finalement arrivés au Congo le 18 avril 2014 ».

« J'ai dit : 'Mon Dieu, où puis-je aller pour être en sécurité avec ma famille ?' »

Ils ont passé les 11 mois suivants à Sidi, dans une installation informelle près de la frontière. Le HCR les a emmenés ici, à Bili, à quelque 50 kilomètres de la frontière, dès l'ouverture du nouveau camp.

« Je suis très heureux d'être ici », déclare Jean. « Les six habitations autour de la mienne sont toutes occupées par ma famille. Ma mère habite dans l'une d'elles avec quatre petits-enfants. Ma soeur est dans une autre avec deux enfants. Mon frère est dans une autre avec un enfant, et mon petit frère attend sa femme et ses enfants qui sont toujours à Bangui ».

Plus de 90 000 réfugiés de RCA vivent actuellement en RDC. Certains résident dans l'un des cinq camps de réfugiés - Mole, Boyabu, Zongo, Bili et Mboti - où le HCR et ses partenaires fournissent une aide d'urgence. D'autres vivent dans les communautés d'accueil.

L'un des quatre enfants survivants de Jean et Edwige est enregistré par le HCR dans le camp de réfugiés de Bili, en RDC. Après près de deux années en fuite, ils ont finalement trouvé la sécurité.

Edwige, la femme de Jean, et le plus jeune de leurs quatre enfants attendent leur enregistrement au camp de réfugiés de Bili, en RDC. Il leur a fallu presque deux ans pour échapper à la violence dans leur pays d'origine.

Beaucoup de réfugiés du camp de Bili me disent qu'ils s'attendent à ce que les combats en République centrafricaine se poursuivent, provoquant encore plus d'instabilité et de déplacements en 2015.

Mais Jean est optimiste. Malgré cette rude épreuve, il espère pouvoir retourner un jour dans son pays.

« J'espère retourner en RCA, car c'est mon pays », dit-il, avec un sourire d'espoir. « J'attends le bon moment pour rentrer. J'ai entendu parler d'une possibilité de rentrer pour les élections ».

Avant de partir, je remercie Jean pour son temps - et il me remercie en retour. « Je me demandais quand quelqu'un me solliciterait pour raconter mon histoire », dit-il. « Je suis très heureux que vous l'ayez fait ».