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Un humanitaire dans l'âme

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Un humanitaire dans l'âme

Après avoir fui leur patrie, des réfugiés comme le Dr Ahmed se portent volontaires pour aider leurs compatriotes syriens à s'adapter à la vie en exil.
11 Décembre 2014
Le Dr Ahmed partage un repas avec Khaled, un réfugié blessé de Syrie.

Il y a trois ans, lorsque la violence a éclaté dans les rues de la ville syrienne d'Idlib, la plupart des résidents se sont barricadés dans leur maison derrière des volets clos pendant que les combats faisaient rage à l'extérieur. Le Dr Ahmed n'était pas de ceux-là. Au lieu de cela, il s'est aventuré dehors pour soigner les blessés.

Le dermatologue et spécialiste des plantes, âgé de 45 ans, s'employait à cautériser des plaies (dans un cas, il a dû se servir d'une brochette à barbecue chauffée à la flamme de gaz), à soigner des fractures et à secourir des enfants séparés de leurs parents. « Quand vous voyez un autre être humain gisant dans la rue, vous devez l'aider », dit-il.

Aujourd'hui, Ahmed continue de venir en aide aux déplacés, mais il agit en arrière-plan plutôt qu'au coeur même du conflit syrien. Il fait partie des quelque 430 réfugiés bénévoles du HCR au Liban, dont les frais de déplacement et de communication sont remboursés. Ces bénévoles ont pour tâche de visiter les quartiers et agglomérations où vivent leurs compatriotes réfugiés pour leur offrir de l'information pratique et une main secourable. Ahmed a fui le Liban avec sa famille en 2011 et travaille comme bénévole depuis le début de l'année.

Quand vous voyez un autre être humain gisant dans la rue, vous devez l'aider », dit-il.

Les besoins sont immenses. Au Liban seulement, environ 1,1 million de réfugiés sont enregistrés auprès du HCR. Ces personnes ne sont pas regroupées dans des camps centralisés, mais dispersées dans des zones montagneuses et des quartiers urbains difficiles d'accès où les routes sont dans un piètre état et les communications limitées. La seule localisation de ces personnes peut représenter en soi un défi. Beaucoup arrivent au Liban avec peu d'argent et ignorent complètement la façon d'obtenir des services essentiels. Les bénévoles comme Ahmed font appel à leurs contacts pour repérer les personnes les plus vulnérables, de manière à pouvoir les conseiller sur l'aide accessible par l'intermédiaire du gouvernement, du HRC et des organismes d'aide partenaires du HCR.

Le Dr Ahmed se tient debout devant un immeuble d'habitation délabré et criblé d'impacts de balles dans lequel il loue un petit appartement où il vit avec sa femme et son jeune fils à Tripoli, nord du Liban.

Ahmed, bénévole du HCR, discute avec des réfugiés syriens dans la rue à Tripoli.

Ahmed visite l'un des réfugiés syriens qu'il essaie d'aider à Tripoli.

Ahmed et sa femme, Siham, mettent au lit leur fils âgé de deux ans, Elias, pour la sieste de l'après-midi dans le petit appartement où ils vivent à Tripoli.

Ahmed est un humanitaire dans l'âme. Au Liban, il n'est pas autorisé à pratiquer la médecine sans permis d'exercice libanais. Mais lorsque le HCR lui a proposé d'oeuvrer à informer les nouveaux arrivants sur la façon d'obtenir de l'aide médicale, il a bondi sur l'occasion. C'est un travail qui « m'était prédestiné », dit-il devant une tasse de thé dans son appartement sommairement meublé du dernier étage d'un immeuble grêlé d'impacts de balles à Tripoli. « Lorsque je vois de la souffrance et que je peux apporter de l'aide... ça me donne un sentiment extraordinaire. »

La pratique de la profession de dermatologue lui manque-t-elle? « Je pratique la profession d'être humain », dit-il.

Récemment, au cours d'une même matinée, il a aidé à trouver un physiothérapeute pour un homme qui a eu le bras paralysé après avoir été blessé par balle à Homs, il a récupéré un petit sac de médicaments anticoagulants pour une personne âgée victime d'un accident vasculaire cérébral qui était trop faible pour se rendre toute seule à la pharmacie, et il a conseillé et écouté avec compassion une mère dont trois enfants étaient malades.

Avant en Syrie, Ahmed, comme la plupart des médecins pratiquant dans des zones de conflit, n'était pas en mesure d'ouvrir les portes de sa clinique ni de travailler dans les hôpitaux. Mais il sortait fréquemment pour soigner les blessés. C'était un travail dangereux.

Une fois, lors d'un cortège funèbre qui a dégénéré dans la violence, il s'était agenouillé près d'un homme qui venait de recevoir une balle dans le ventre, sa main appuyant sur sa blessure - avant de voir une deuxième balle frapper l'homme à la tête, le tuant.

À une autre occasion, une fillette de quatre ans a couru vers lui après avoir perdu de vue ses parents. Tous deux sont restés tapis dans l'embrasure d'une porte pendant huit heures tandis que des combats faisaient rage autour d'eux. Finalement, Ahmed a repéré la mère et a tenté de lui ramener son enfant, mais il n'a pu que voir, horrifié, la femme se faire abattre devant ses yeux par un tireur embusqué. Il a plus tard retrouvé le père et a pu lui rendre l'enfant.

Ahmed discute avec un autre bénévole du HCR, également nommé Ahmed, à Tripoli, Liban.

Le fils de deux ans d'Ahmed, Elias, roule en tricycle le long du couloir de l'appartement où la famille vit à Tripoli.

Ahmed, un bénévole du HCR, descend les escaliers de l'immeuble d'habitation où il loue un petit appartement avec sa femme et son jeune fils à Tripoli, nord du Liban.

Ahmed s'apprête à mettre un pansement sur une coupure à la main d'un jeune réfugié syrien qu'il visite à Tripoli, Liban.

Ahmed, un bénévole du HCR et sa femme, Siham, préparent à manger dans la cuisine du petit appartement où ils vivent à Tripoli. Ahmed, un bénévole du HCR et sa femme, Siham, préparent à manger dans la cuisine du petit appartement où ils vivent à Tripoli.

Ahmed visite les membres d'une famille syrienne qui vivent comme réfugiés à Tripoli.

Après avoir résisté plusieurs mois dans la ville, Ahmed a reçu un coup de fil de quelqu'un qu'il avait soigné dans la rue. Cette connaissance le prévenait que son nom figurait sur une liste de personnes devant être mises en détention. Lui et sa femme, qui était enceinte à cette époque, ont décidé qu'il était temps de s'enfuir.

La vie est moins dangereuse au Liban, mais non sans difficulté. Ahmed habite dans un secteur de Tripoli qui connaît régulièrement des explosions de violence sectaire. Les murs de béton de son quartier sont littéralement labourés par des impacts de tirs, et l'immeuble où sa femme et lui vivent est encerclé par des postes de contrôle militaires. Il lui est arrivé une fois d'être arrêté par des soldats sur le qui-vive qui tenaient pour suspecte toute personne circulant librement. « Il n'est pas facile de sortir du quartier, encore moins de traverser la ville », dit-il.

La pratique de la profession de dermatologue lui manque-t-elle? « Je pratique la profession d'être humain », dit-il.

Ahmed a indiqué qu'il restera au Liban aussi longtemps que durera la guerre en Syrie. Toutefois, lui et sa femme s'ennuient énormément des vergers et des champs verdoyants de leur ville d'origine d'Idlib, un centre agricole situé dans le nord-ouest du pays, près de la frontière avec la Turquie.

Il avait visité le Liban avant la guerre, principalement pour faire des recherches sur les utilisations médicinales de plantes qui poussent dans les hautes montagnes - une de ses passions - et se dit satisfait de pouvoir jouer un rôle utile en dépit des difficultés de la vie ici. Il s'inquiète surtout pour la génération suivante, dont son fils, Elias, qui est né ici. « Je prie pour que ces jeunes ne soient pas happés dans une spirale de représailles et de vengeance. »

Pour l'heure, Ahmed fera ce qu'il peut pour apporter sa contribution. « Dieu merci qu'il est là ! », s'exclame Huda, une mère de six ans à Tripoli, après la récente visite d'Ahmed un après-midi d'hiver. « Il est venu pour nous aider. »