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Note sur les lignes directrices du HCR pour la protection des femmes réfugiés

Réunions du Comité exécutif

Note sur les lignes directrices du HCR pour la protection des femmes réfugiés
EC/SCP/67

22 Juillet 1991

SOUS-COMITE PLENIER SUR LA PROTECTION INTERNATIONALE

NOTE SUR LES LIGNES DIRECTRICES DU HCR POUR LA PROTECTION DES FEMMES REFUGIES
(Présentée par le Haut Commissaire)

1. Le Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire s'est penché régulièrement sur la question des besoins des femmes réfugiées en matière de protection.12 Il a notamment examiné, à sa quarante et unième session, en 1990 deux documents qui lui ont été présentés, l'un sur la politique du HCR concernant les femmes réfugiées3 et l'autre sur les femmes réfugiées et la protection internationale,4 et il a adopté des conclusions, dans lesquelles il a notamment invité le HCR « à établir de toute urgence des directives globales concernant la protection des femmes réfugiées ... ».5

2. Conformément à cette demande, le HCR a établi des directives, avec l'aide d'un consultant expert de ces questions. Les Lignes directrices pour la protection des femmes réfugiées sont présentées ci-joint au Comité exécutif pour information.

3. Ainsi qu'il ressort des Lignes directrices, les femmes ont, en matière de protection, les mêmes problèmes que tous les réfugiés. Comme eux, elles ont besoin d'une protection contre le retour forcé dans leur pays d'origine, les attaques armées et d'autres formes de violence et contre la détention injustifiée et indûment prolongée; il convient aussi qu'elles aient un statut juridique, dans le cadre duquel des droits économiques et sociaux appropriés leur soient reconnus et qu'elles bénéficient de l'essentiel : vivres, abri, vêtements et soins médicaux. Outre ces besoins fondamentaux qu'elles partagent avec tous les réfugiés, les femmes adolescentes et fillettes réfugiées ont besoin d'une protection spéciale du fait de leur sexe : elles ont besoin, par exemple, d'une protection contre les violences et l'exploitation sexuelles et physiques et contre la discrimination sexuelle en ce qui concerne la distribution des biens et des services.

4. Il est clair d'après les Lignes directrices que la protection des femmes réfugiées exige le respect non seulement de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967, mais aussi d'autres instruments internationaux pertinents, tels que les Conventions de Genève de 1949 et les deux Protocoles additionnels de 1977, les Pactes de 1966 relatifs aux droits de l'homme et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Certains Etats ne sont pas parties à tous ces instruments qui n'en constituent pas moins un cadre de règles internationales en matière de droits de l'homme dans lequel définir les activités d'assistance et de protection en faveur des femmes réfugiées.

5. Cependant, la protection internationale va au-delà de l'adhésion à des principes de droit. Il est tout aussi important, pour ce qui est de la protection des femmes réfugiées, d'user de méthode et de bon sens pour mettre au point des programmes et établir des priorités de nature à renforcer leur sécurité et leur bien-être. Ainsi, la protection internationale des femmes réfugiées doit s'entendre au sens le plus large. Les femmes réfugiées, dans l'incapacité de se nourrir, de se vêtir et de trouver un abri pour elles-mêmes et leurs enfants, risquent, par exemple, davantage de subir des violences physiques et sexuelles en cherchant à se procurer le nécessaire dans ces domaines.

6. La relation intrinsèque qui existe entre protection et assistance est particulièrement évidente en ce qui concerne les femmes réfugiées. Il est souligné dans les Lignes directrices que la meilleure façon de résoudre les problèmes de protection est souvent de prendre des mesures d'assistance. Inversement, la planification et la mise en oeuvre des programmes d'assistance peuvent avoir des conséquences directes, parfois négatives, sur la protection des femmes réfugiées si leurs besoins spécifiques sont ignorés.

7. D'une manière générale, les Lignes directrices ont pour objet d'aider le personnel du HCR et de ses agents d'exécution à définir les questions et les problèmes de protection propres aux femmes réfugiées et à organiser les activités d'assistance et de protection en tenant compte de ceux-ci. En résumé, les Lignes directrices portent sur des aspects traditionnels de la protection tels que la détermination du statut de réfugié et la sécurité physique. Elles exposent les diverses mesures susceptibles d'améliorer la protection des femmes réfugiées. Compte tenu du principe selon lequel il vaut mieux prévenir que guérir, des suggestions y sont faites quant aux mesures qui peuvent être prises, en particulier dans les secteurs traditionnels de l'assistance, pour empêcher que des problèmes de protection ne se produisent. On y présente aussi les façons d'aider les femmes dont les droits ont été violés. Enfin, il est question des mesures qui peuvent être prises pour améliorer la protection des femmes et pour signaler les problèmes qui se posent effectivement dans ce domaine.

8. Bien que les Lignes directrices du HCR pour la protection des femmes réfugiées aient été mises au point, compte particulièrement tenu du mandat et des besoins opérationnels du Haut Commissariat, il faut néanmoins espérer qu'elles seront aussi très utiles aux Etats qui accueillent des groupes de réfugiés et sont en fin de compte responsables de leur protection.

LIGNES DIRECTRICES POUR LA PROTECTION DES FEMMES REFUGIEES

Préparé par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, Genève, juillet 1991

SECTION I : INTRODUCTION

A. Présentation générale

1. La protection est au coeur des responsabilités de la communauté internationale envers les réfugiés. Les réfugiés en tant que groupe sont doublement défavorisés et sensibles aux atteintes à leur protection. Tout d'abord, ils sont, effectivement ou potentiellement, victimes de violations des droits de l'homme, de conflits et autres actes d'agression. En outre, ils sont en dehors de leurs pays et ne peuvent ou ne veulent se prévaloir de la protection que leurs gouvernements devraient leur fournir. La protection internationale suppose que l'on prenne toutes les mesures nécessaires, pour garantir que les réfugiés reçoivent une protection suffisante et jouissent effectivement de leurs droits.

2. Les femmes ont les mêmes problèmes, en matière de protection, que tous les réfugiés. Comme eux tous, elles ont besoin d'être protégées contre le retour forcé dans leur pays d'origine, contre les attaques armées et autres formes de violence, contre la détention injustifiée et indûment prolongée et elles devraient avoir un statut juridique qui leur confère des droits économiques et sociaux appropriés; le minimum nécessaire devrait en outre leur être assuré en matière d'alimentation, d'abri, de vêtements et de soins médicaux.

3. Outre ces besoins fondamentaux, communs à tous les réfugiés, les femmes, adolescentes et fillettes réfugiées ont besoin d'une protection spéciale du fait de leur sexe : elles doivent, par exemple, être protégées contre les manipulations, les violences et l'exploitation sexuelles et physiques, ainsi que contre la discrimination sexuelle en ce qui concerne la distribution des biens et des services.

4. Les Lignes directrices s'inspirent du cadre général décrit dans la Politique du HCR concernant les femmes réfugiées, adoptée par le Comité exécutif à sa quarante et unième session. Le principe fondamental de cette politique est d'intégrer les ressources et les besoins des femmes réfugiées dans tous les aspects de la programmation pour garantir des activités équitables en matière de protection et d'assistance. On reconnaît aussi, dans les Lignes directrices, que des efforts particuliers seront peut-être nécessaires pour résoudre les problèmes propres aux femmes réfugiées.

B. Cadre juridique

5. Les structures fondamentales et les instruments juridiques relatifs à la protection des réfugiés ont été établis il y a 40 ans. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a été créé le 1er janvier 1951 et la Convention de l'ONU relative au statut des réfugiés a été adoptée en juillet 1951. Cette convention avait pour objet essentiel de donner une définition générale de la personne qui pouvait être considérée comme réfugiée et de définir son statut juridique. Au paragraphe 1 du Statut du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (résolution 428 (V) de l'Assemblée générale, en date du 14 décembre 1950), il est stipulé que le Haut Commissaire assume les fonctions de protection internationale en ce qui concerne les réfugiés qui entrent dans le cadre du Statut et de recherche de solutions permanentes aux problèmes des réfugiés. Depuis, conformément au Statut, l'Assemblée générale des Nations Unies a, par une série de résolutions, étendu la compétence du HCR aux rapatriés et aux personnes déplacées relevant de la compétence du HCR.

6. Pour assurer la protection des femmes réfugiés, il faut adhérer non seulement à la Convention de 1951 et au Protocole de 1967, mais aussi à d'autres instruments internationaux pertinents, tels que la Déclaration universelle des droits de l'homme; les Convention de Genève de 1949 et les deux Protocoles additionnels de 1977; les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme de 1966; la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes; la Déclaration sur la protection des femmes et des enfants en période d'urgence et de conflit armé; la Convention sur le consentement au mariage, l'âge minimum du mariage et l'enregistrement des mariages; la Convention sur la nationalité de la femme mariée et la Convention relative aux droits de l'enfant. Certains Etats ne sont pas parties à tous ces instruments qui constituent néanmoins, dans le domaine des droits de l'homme, un ensemble de règles internationales dans le cadre duquel seront menées à bien des activités de protection et d'assistance en faveur des femmes réfugiés.

7. On peut tirer de ces divers instruments internationaux des principes d'égalité sur lesquels toutes les politiques et tous les programmes du HCR en faveur des réfugiés devraient être fondés. L'article premier de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes stipule qu'aucune distinction, exclusion ou restriction, « fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine », ne doit être faite.

8. En dehors du droit international, la législation nationale du pays d'asile régit la protection des femmes réfugiées. Les signataires de la Convention de 1951 ou du Protocole de 1967 sont convenus de coopérer avec le HCR dans l'exercice de ses fonctions et en particulier de faciliter sa tâche de surveillance de l'application des dispositions de la Convention et du Protocole (art. 35 et II, respectivement). En outre, les lois et politiques nationales déterminent le statut juridique des femmes, l'endroit où elles vont habiter et l'assistance qui leur sera fournie. Par ailleurs, de nombreux délits dont les femmes sont victimes, tels que le viol ou la violence physique, sont punissables au regard des lois nationales. Les codes et mécanismes juridiques adoptés à l'usage interne dans les camps de réfugiés constituent un autre cadre juridique, à l'intérieur du cadre national. Il est particulièrement important que ces instruments d'autogestion contiennent des dispositions relatives à la protection des femmes réfugiés.

C. Au-delà des mesures juridiques

9. La protection internationale va au-delà de l'adhésion à des principes juridiques. Pour assurer la protection des femmes réfugiés, il importe aussi de faire preuve de méthodes et de beaucoup de bon sens en établissant des programmes et en appliquant des priorités qui contribuent à leur sécurité et à leur bien-être. Ainsi, la protection internationale des femmes réfugiées doit être prise dans son sens le plus large. Les femmes réfugiées qui ne peuvent subvenir à leurs besoins ni à ceux de leurs enfants en ce qui concerne l'habillement, le vivre et le couvert, seront davantage exposées, pour obtenir ce qui leur manque dans ces domaines, à des manipulations ainsi qu'à des violences physiques et sexuelles. Les femmes réfugiées qui se trouvent parmi des étrangers et/ou qui sont soustraites au système traditionnel de protection sociale courront de plus grands dangers que celles qui sont avec leur famille et leurs amis. Les femmes réfugiées qui doivent acheter les gardes pour obtenir du bois à brûler, de l'eau ou d'autres biens essentiels seront davantage exposées au harcèlement sexuel. En outre, les femmes réfugiées qui pouvaient auparavant exprimer leurs vues dans la communauté peuvent se trouver dans l'impossibilité de le faire dans les comités de gestion des camps mis en place par les organismes d'assistance.

10. Comme ces exemples le montrent, la relation intrinsèque qui existe entre les activités de protection et d'assistance est particulièrement évidente en ce qui concerne les femmes, les adolescentes et les fillettes réfugiées. Bien souvent, c'est par des mesures d'assistance que l'on peut le mieux résoudre les problèmes de protection. A l'inverse, la planification et la mise en oeuvre des programmes d'assistance peuvent avoir des répercussions directes, et parfois néfastes, sur la protection des femmes réfugiées s'il n'est pas tenu compte de leurs besoins spécifiques.

11. Pour que l'on comprenne pleinement les besoins des femmes réfugiées en matière de protection et que l'on trouve des solutions, il faut qu'elles participent elles-mêmes à la planification des activités de protection et d'assistance. Les programmes qui ne sont pas conçus en consultation avec les bénéficiaires, ni exécutés avec leur participation, ne peuvent être efficaces. Etant donné qu'une forte proportion de réfugiés sont des femmes, assumant souvent seules la responsabilité des enfants à leur charge, il faut absolument, pour que les activités d'assistance soient adaptées à leurs besoins, qu'elles participent à leur planification et à la fourniture de l'assistance prévue.

12. La participation en elle-même favorise la protection. Les problèmes internes de protection sont souvent dus tout autant aux sentiments d'isolement, de frustration, de manque d'appartenance à une société structurée ou d'absence de maîtrise sur son propre avenir que les gens éprouvent, qu'à toute autre forme de problème social. Ceci est peut-être particulièrement évident dans les camps surpeuplés. La participation des réfugiés aide à forger les valeurs et le sens communautaire qui contribuent à atténuer les problèmes de protection.

13. Les responsables des secours mettent souvent l'accent sur les contraintes d'ordre culturel qui pèsent sur la participation des femmes à la prise des décisions, en particulier lorsque les femmes ont eu un rôle limité dans leur pays d'origine. Ils font observer que le fait de les inviter à participer à la prise des décisions revient à porter atteinte à la culture du groupe.

14. Il se peut toutefois que les responsables des secours n'aient qu'une compréhension superficielle du rôle socioculturel des femmes et que leurs préoccupations découlent de préjugés tenant à leur culture ou d'une compréhension insuffisante tant des cultures traditionnelles que des nouvelles circonstances dans lesquelles les femmes réfugiées se trouvent. Avant de fuir leur pays, les femmes avaient la possibilité d'exprimer leurs préoccupations et leurs besoins, par l'intermédiaire de leurs époux ou des réseaux de soutien traditionnels. Cependant, dans les camps de réfugiés, la participation des femmes par l'intermédiaire de ce genre de mécanismes traditionnels est impossible car ils se sont disloqués. Il faut trouver des solutions de remplacement pour qu'elles puissent se faire entendre et que l'on tienne compte des points de vue qu'elles ont à offrir lors de la prise des décisions. Il est donc indispensable que les organismes s'occupant des réfugiés reconnaissent qu'il faudra parfois prendre des initiatives particulières pour que les femmes réfugiées aient la possibilité de participer à la planification des activités.

15. Dans de nombreux cas, il faudra pour que les projets visant à garantir la protection des femmes réfugiées soient efficaces, que le gouvernement, le personnel d'autres organisations et/ou les responsables des communautés donnent leur adhésion, officiellement ou non. Ils formuleront peut-être des objections fondées sur des idées traditionnelles quant au rôle des femmes dans les cultures du pays d'origine ou du pays d'asile. Il est indispensable, en pareil cas, qu'ils comprennent :

  • les responsabilités du HCR en ce qui concerne la protection des femmes réfugiées; et

  • la nécessité pour le HCR de respecter les instruments internationaux qui garantissent l'égalité entre hommes et femmes ainsi qu'une utilisation et une distribution de l'aide du HCR exemptes de discrimination.

D. Objet des Lignes directrices

16. Les Lignes directrices pour la protection des femmes réfugiées ont été élaborées pour aider le personnel du HCR et de ses partenaires opérationnels à identifier, dans le domaine de la protection, les questions, les problèmes et les risques qui sont propres aux femmes réfugiées. Elles portent sur des aspects traditionnels de la protection tels que la détermination du statut de réfugiée et la sécurité physique. Diverses mesures sont proposées pour améliorer la protection des femmes réfugiées. Fondées sur le principe selon lequel il vaut mieux prévenir que guérir, les Lignes directrices suggèrent les moyens susceptibles d'être employés, en particulier dans les secteurs d'assistance traditionnels, pour empêcher que des problèmes de protection ne surgissent. Elle décrivent en outre comment venir en aide aux femmes dont les droits ont été violés. Elles exposent enfin les mesures qui peuvent être prises pour atténuer et pour signaler les problèmes qui se posent effectivement.

E. Structure

17. La section II contient de brèves directives relatives à l'évaluation de la situation en ce qui concerne la protection des femmes réfugiées.

18. Il est question dans la section III des genres de besoins en matière de protection qui sont susceptibles de se présenter dans différentes situations et des interventions qui peuvent précisément convenir dans ces cas-là. Elle comporte deux grandes parties : la première décrit en détail les problèmes que rencontrent les femmes réfugiées quant à leur sécurité physique; la seconde décrit de même les problèmes de protection juridique qu'elles peuvent rencontrer.

19. La section IV porte sur les améliorations qui peuvent être apportées pour empêcher les mauvais traitements aux frontières mais aussi dans la conception des camps et des zones d'installation, la fourniture de l'assistance et dans les activités en matière d'éducation et de formation et les activités génératrices de revenus pour renforcer la protection des femmes réfugiées. Y sont décrites aussi les activités qui peuvent être entreprises dans ces secteurs pour aider les femmes réfugiées qui ont été victimes de problèmes de protection.

20. La section V porte sur les mesures spécifiques à prendre lorsque des problèmes de protection ont été identifiés, pour les résoudre si possible, et les signaler lorsqu'ils se produisent.

SECTION II : EVALUATION ET PLANIFICATION

A. Objectif du processus d'évaluation et de planification

21. L'action entreprise en vue d'éviter ou de résoudre les problèmes qui se posent en matière de protection sera facilitée par une meilleure connaissance de la composition démographique de la population réfugiée, des besoins de protection propres à chaque catégorie de réfugiés (hommes, femmes et enfants) et des dispositifs de protection habituellement déployés pour assurer la sécurité des groupes vulnérables. Ces données entrent en ligne de compte dans le processus de planification et sont associées à d'autres considérations pratiques telles que les ressources humaines, financières et matérielles disponibles lorsque des activités sont proposées en faveur des réfugiés.

22. L'évaluation et la planification sont nécessaires à tous les stades d'une situation de réfugié, c'est-à-dire depuis la situation d'urgence de départ, pendant la période de soins et d'entretien et jusqu'à la découverte d'une solution durable. Il est très important d'évaluer rapidement les problèmes liés à la protection des femmes réfugiées pour deux raisons principales. Tout d'abord, ces dernières sont, dans certains cas, particulièrement exposées à des violations de leur sécurité au passage de la frontière, lorsqu'elles entrent dans un pays d'asile. Plus vite on évaluera les dangers qu'elles courent, plus vite on sera à même de s'attaquer à ces problèmes et de renforcer leur protection. Ensuite la rapidité avec laquelle les décisions sont prises en situation d'urgence sur des points fondamentaux comme l'aménagement des camps et les mécanismes de distribution des vivres aura des répercussions à long terme sur la protection des femmes réfugiées. Si l'on évalue leurs répercussions sur les groupes ayant des besoins propres, on pourra prendre des décisions qui éviteront à l'avenir beaucoup de problèmes.

B. Questions que les évaluations doivent permettre de résoudre

23. Les problèmes qui se posent dans le contexte de la protection des femmes réfugiées sont à considérer sous un double aspect. Il faut d'abord évaluer les besoins de protection de l'ensemble des réfugiés. Les femmes et les enfants à leur charge représentant une majorité des réfugiés dans la plupart des pays, ils sont, par définition, concernés par ces aspects généraux de la protection. Il convient ensuite de cerner les problèmes intéressant exclusivement les femmes réfugiées.

Questions clés - Stade d'urgence

  • Prévenir les agressions dont les femmes réfugiées peuvent être victimes au passage des frontières

  • Avoir une connaissance générale du profil démographique de la population réfugiée, par sexe et par âge

  • Faire participer les femmes réfugiées à la planification de l'assistance, des services et des mesures de protection, à la fourniture de l'assistance et des services et à l'application desdites mesures

  • Concevoir l'aménagement des camps et choisir leur emplacement en vue d'une meilleure protection

  • Mener une politique d'assistance garantissant aux femmes réfugiées non accompagnées et aux femmes chefs de famille l'accès aux vivres, au logement, aux soins médicaux, à l'eau pure, au bois à brûler, etc

  • Donner aux femmes la possibilité d'obtenir, pour leur enregistrement, des papiers établis en leur nom propre

  • Accorder, dans la mesure du possible, aux femmes qui demandent asile le droit à ce que leur cause soit entendue équitablement en ce qui concerne la procédure d'octroi du statut de réfugié

  • Identifier les groupes particulièrement vulnérables afin qu'une attention spéciale soit accordée à leur protection

  • Regrouper les familles séparées au cours de la fuite

  • S'assurer que le personnel est suffisamment au courant des besoins des femmes pour tenir compte des facteurs sociaux dans la planification

  • Veiller à ce que les femmes soient suffisamment représentées parmi le personnel, notamment les agents chargés de la protection et les agents sanitaires

Questions clés - Situations de réfugiés à long terme

  • Définir le profil démographique de la population réfugiée, par sexe et par âge

  • Faire participer les femmes réfugiées à la planification de l'assistance, des services et des mesures de protection, à la fourniture de l'assistance et des services et à l'application desdites mesures

  • Prévenir les agressions dont les femmes peuvent être victimes dans les camps de réfugiés

  • Concevoir l'aménagement des camps et choisir leur emplacement des camps de façon à renforcer la sécurité des femmes réfugiées

  • Mener une politique d'assistance garantissant aux femmes réfugiées non accompagnées et aux femmes chefs de famille l'accès aux vivres, au logement, aux soins médicaux, à l'eau pure, au bois à brûler, etc

  • Donner aux femmes la possibilité d'obtenir, pour leur enregistrement, des papiers établis en leur nom propre

  • Faire participer les femmes aux programmes d'activités génératrices de revenus et de formation professionnelle, de façon à leur permettre de subvenir elles-mêmes à leurs besoins et à ceux de leurs familles

  • Faire participer les femmes réfugiées aux programmes de rapatriement librement consenti, de réinstallation et d'intégration sur place, et leur donner les renseignements nécessaires pour pouvoir choisir, en connaissance de cause, une solution durable

  • Recruter et former des personnes, notamment des femmes, qui soient disposées à tenir compte des problèmes des femmes dans la planification et l'exécution des programmes

24. Les questions que soulève l'évaluation des problèmes liés à la protection des femmes réfugiées recouvrent un grand nombre de domaines. Il n'est toutefois pas nécessaire de se les poser en même temps et elles n'ont d'ailleurs pas toutes la même importance.

25. Il peut être utile, pour mener à bien l'évaluation, de s'assurer la collaboration d'un certain nombre de fonctionnaires du HCR, en consultation avec les organisations non gouvernementales, le gouvernement du pays d'accueil et les réfugiés et avec leur concours. Certaines questions relèvent plutôt de la compétence des administrateurs chargés de la protection tandis que d'autres sont du domaine des responsables des services sociaux, des agents sanitaires ou d'autres encore.

26. Il convient plus précisément, pour évaluer la situation des femmes réfugiées dans le domaine de la protection, de poser entre autres questions celles qui suivent :

a) Circonstances dans lesquelles se situe leur déplacement

  • Quelles sont les causes de leur déplacement ?

  • Doivent-elles aller plus loin ? Dans l'affirmative, dans quelle progression ? Peut-on s'attendre à de nouveaux déplacements ?

  • Les raisons de leur déplacement permettent-elles de supposer qu'il existe parmi les réfugiés un groupe particulièrement vulnérable ? Dans l'affirmative, lequel et pour quelles raisons ?

  • Comment sont-elles arrivées jusqu'ici ? : à pied, en bateau, en avion, ou par d'autres moyens ?

  • Les femmes réfugiées ont-elles rencontré des problèmes liés à leur protection en traversant la frontière ? Dans l'affirmative, lesquel parmi la liste ci-après :

  • agressions,

  • viols,

  • services sexuels,

  • harcèlement sexuel,

  • enlèvements,

  • autres problèmes ?

  • Par qui le délit a-t-il été commis ? Ces problèmes risquent-ils de se reproduire ?

  • Des agents chargés de la protection des réfugiés sont-ils déployés le long de la frontière ? Dans l'affirmative, de qui relèvent-ils ?

  • Y a-t-il également des femmes parmi eux ?

  • Est-il prévu que ce déplacement sera de brève ou de longue durée ?

  • Les réfugiés se déplacent-ils individuellement, en famille ou en groupes plus importants ? Les femmes non accompagnées sont-elles intégrées à des familles ou à d'autres groupes de réfugiés pendant le vol ?

  • Des familles ont-elles été séparées ou divisées ? Y a-t-il des familles monoparentales ou des mères chefs de famille ?

  • Y a-t-il eu des blessés parmi les réfugiés, soit avant, soit pendant le vol ? Dans l'affirmative, pour quelles raisons et quel est le nombre de personnes concernées ? Y a-t-il des femmes parmi elles ? Des femmes ont-elles été chargées de l'assistance aux blessés ?

  • Les réfugiés ont-ils pu emporter quelques biens avec eux ? Les femmes ont-elles accès à ces biens ?

  • Quel est leur état de santé à l'arrivée ?

b) Caractéristiques de la population réfugiée

  • Quelle est l'origine ethnique, culturelle et linguistique de ces personnes ?

  • Quelle est la place réservée à la femme dans leurs principales traditions, leur organisation social et leur mode de vie ?

  • Quels sont les pourcentages respectifs d'hommes et de femmes ?

  • Quelle est la répartition par âge des deux sexes dans la population réfugiée ?

c) Accueil des réfugiés sur place et comportement de la population locale

  • Quel est l'accueil réservé aux réfugiés par la population locale ? De quelle manière sont-ils traités par le gouvernement du pays d'asile, et par le personnel de l'armée et de la police dans la région ?

  • Existe-t-il, dans le pays d'asile, des coutumes locales relatives au rôle de la femme, susceptibles de compromettre la sécurité des femmes réfugiées ou de modifier leur statut juridique ?

  • Les réfugiés représentent-ils une charge pour les ressources (notamment en eau, denrées alimentaires et bois à brûler) et les services de la région ? Cette situation présente-t-elle des inconvénients pour la population locale ? Dans l'affirmative, quelles sont les catégories de personnes les plus touchées ? Y a-t-il des femmes parmi elles ?

d) Aménagement et emplacement des camps

  • A quelle distance de la frontière les réfugiés sont-ils installés ?

  • Les camps sont-ils exposés à des attaques armées ?

  • Comment le camp ou autre lieu d'installation a-t-il été aménagé ? Cet aménagement est-il semblable à celui auquel les réfugiés sont habitués dans leurs villages et autres localités ? Les réfugiés ont-ils été consultés ?

  • Les différents groupes ethniques/tribaux sont-ils été mélangés ou sont-ils logés dans des sections séparées ?

  • Le camp ou autre lieu d'installation est-il isolé des communautés avoisinantes ou intégré dans la population locale ?

  • Les réfugiés peuvent-ils se déplacer librement à l'intérieur et à l'extérieur du camp ? Quelle est la nature des restrictions éventuellement imposées à leur liberté de circulation ? Les hommes et les femmes sont-ils soumis au même régime à cet égard ? Les hommes et les femmes ont-ils la même liberté d'aller et venir ?

  • Le camp est-il gardé ? Dans l'affirmative, par qui et quels sont les moyens matériels employés ?

  • Les gardes sont-ils instruits des droits des femmes et des tâches qui leur incombent à l'égard de la protection des femmes réfugiées ?

  • Le camp est-il éclairé la nuit ? Dans l'affirmative, de quelle manière ? L'éclairage est-il assuré dans toutes les parties du camp

  • Où sont situées les latrines et les installations sanitaires par rapport aux installations d'hébergement ? Une certaine intimité y est-elle assurée ? Y a-t-il des heures pendant lesquelles l'accès est réservé aux femmes et aux enfants ? Les femmes peuvent-elles sans danger s'y rendre seules, notamment la nuit ?

  • Quelle est la distance qui sépare les installations d'hébergement des sources d'approvisionnement en eau et en bois à brûler ? Une autorisation spéciale est-elle nécessaire pour aller chercher de l'eau ou du bois à brûler ? Faut-il sortir des limites du camp pour s'approvisionner en eau et en bois à brûler ? Cela comporte-t-il des risques ? Les femmes peuvent-elles accéder en toute sécurité aux points d'approvisionnement en eau et en bois à brûler, étant donné que, dans beaucoup de sociétés, c'est à elles qu'échoit généralement cette tâche ?

  • Où, par rapport aux installations d'hébergement, se trouve l'endroit où les réfugiés peuvent bénéficier de l'assistance et des services ? Ont-ils besoin d'un laissez-passer ou d'une autorisation pour s'y rendre ? Le trajet comporte-t-il des risques pour les réfugiés ?

e) Organisation sociale

  • Quelles sont les structures sociales ou autres ? Quels sont apparemment les dirigeants ? Sur quoi repose leur influence ? Dans quelle mesure jouissent-ils de la confiance et de l'appui de différents secteurs de la population ?

  • Le personnel d'encadrement comporte-t-il des femmes ? Existe-t-il des structures sociales séparées, gérées par des femmes ? A défaut, existe-t-il d'autres possibilités pour les femmes de participer à la planification et à l'établissement des programmes ?

  • Existe-t-il des tensions/rivalités au sein de la population ? Dans quelle mesure ces tensions engendrent-elles des problèmes de sécurité pour les femmes réfugiées ?

  • Quels sont les mécanismes traditionnellement utilisés pour garantir la sécurité des groupes vulnérables au sein de la population ? A-t-on étendu l'utilisation de certains de ces mécanismes au camp ou à la zone d'installation de réfugiés ? A-t-on mis au point de nouveaux mécanismes de protection ?

f) Sécurité physique

  • A l'intérieur du camp ou autre lieu d'installation, les femmes doivent-elles faire face à l'un des problèmes de sécurité ci-après :

  • agression physique

  • viol

  • enlèvement

  • menaces

  • harcèlement sexuel

  • obligation d'accorder des « faveurs sexuelles » en échange de papiers et/ou d'articles de secours

  • prostitution forcée

  • vente forcée d'enfants

  • autres problèmes ?

  • Ces situations sont-elles fréquentes ? A quelle échelle se produisent-elles ?

  • Existe-t-il des groupes particuliers de femmes qui sont en état de moindre défense face à ces situations ?

  • Quand ces incidents se produisent-ils le plus souvent ?

  • Quels sont les auteurs de ces méfaits ?

  • Qui rapporte ces incidents et à qui ? Des rumeurs font-elles état d'incidents non signalés ? Qu'advient-il de ces informations ?

  • Quelles mesures sont prises pour éviter aux femmes d'être les victimes de ces situations ?

  • Quelles mesures peut-on prendre pour châtier les coupables et qui en décide ?

  • Y a-t-il des femmes réfugiées qui se livrent à la prostitution ? Dans l'affirmative, quelle est leur proportion ? Existe-t-il des groupes particuliers de femmes plus susceptibles que d'autres de se livrer à la prostitution ? Pourquoi ? Existe-t-il pour elles d'autres possibilités de gagner leur vie ?

g) Accès à l'assistance et aux services

  • Les femmes non accompagnées, les familles monoparentales et/ou les femmes mariées ont-elles accès aux articles ou aménagements de première nécessité (vivres, eau, abri, bois à brûler, vêtements, etc.) au même titre que les hommes ?

  • Les femmes chefs de famille et les femmes non accompagnées ont-elles droit aux articles de secours au même titre que les ménages dont le chef est un homme ?

  • La distribution des vivres pose-t-elle des problèmes de protection particuliers aux femmes (par exemple, sont-elles parfois obligées d'accorder des faveurs sexuelles en échange de nourriture) ?

  • L'approvisionnement en eau comporte-t-il des risques pour la sécurité des femmes (notamment sont-elles obligées de corrompre des gardes ou de traverser des champs de mines pour aller chercher de l'eau) ?

  • Les femmes ont-elles accès aux services de santé dans des conditions d'égalité ? Ceux-ci sont-ils adaptés aux besoins des femmes (y a-t-il par exemple des services de gynécologie) ? Existe-t-il des services d'orientation sociale, notamment pour les personnes victimes de traumatismes ? Des agents de santé publique sont-ils affectés à l'éducation sanitaire des femmes réfugiées (par exemple, en matière d'allaitement, d'hygiène, de planification de la famille) ? Ces services sont-ils adaptés aux particularités culturelles des réfugiés ? Les accoucheuses traditionnelles sont-elles reconnues et bénéficient-elles d'une certaine formation ?

  • Les femmes ont-elles accès, dans des conditions d'égalité, aux programmes de formation professionnelle et aux programmes d'activités génératrices de recettes ?

  • Les filles ont-elles accès, dans des conditions d'égalité, à l'enseignement primaire ?

  • Le personnel féminin employé dans ces différents services, et notamment les services de santé et les services d'orientation sociale, est-il proportionnel au nombre de femmes réfugiées ?

  • Les programmes gérés par des institutions internationales et des organisations non gouvernementales offrent-ils autant de possibilités d'emploi aux femmes réfugiées qu'aux hommes ?

h) Statut juridique et accès aux systèmes juridiques

  • Quel est le statut juridique des personnes concernées ?

  • Les femmes obtiennent-elles, en général, le même statut juridique que les hommes dans les mêmes circonstances ?

  • Comment le statut juridique est-il déterminé ?

  • Les femmes ont-elles accès, au même titre que les hommes, à la procédure de détermination du statut de réfugié, dans le cas où cette procédure est prévue ?

  • S'efforce-t-on d'interroger individuellement les femmes membres d'une famille pour que leur demande du statut de réfugié soit soumise à évaluation ?

  • S'assure-t-on la collaboration d'enquêtrices, dans la procédure de détermination du statut de réfugié ?

  • Les membres du jury sont-ils instruits des droits et des problèmes des femmes réfugiées ? Reçoivent-ils une formation ou une information concernant les situations que rencontrent les femmes dans leur pays d'origine ? Sont-ils au courant des formes que la persécution prend à l'égard des femmes ? Sont-ils au courant des caractéristiques propres aux différentes cultures quand ils interrogent des femmes ayant demandé le statut de réfugié ?

  • Les persécutions fondées sur le sexe sont-elles reconnues par le pays hôte comme motif justifiant l'octroi du statut de réfugié ?

  • Quelles difficultés particulières les femmes rencontrent-elles pour obtenir un statut juridique ?

  • Les femmes bénéficient-elles automatiquement du statut de réfugié accordé à leur mari et vice versa ? Les enfants bénéficient-ils automatiquement du statut de réfugié accordé à leurs parents ?

  • Les femmes obtiennent-elles des papiers d'identité attestant leur statut de réfugié ? Ces papiers sont-ils établis à leur nom propre

  • Leur délivre-t-on des cartes d'identité attestant leur droit de bénéficier d'une assistance ? Ces cartes sont-elles établies en leur nom propre ?

i) Solutions durables

  • Les femmes ont-elles, au même titre que les hommes, accès à l'information sur les programmes de rapatriement librement consenti et la possibilité d'y participer ? Quand on interroge les réfugiés pour savoir s'ils rentrent dans leur pays de leur plein gré, les femmes sont-elles aussi interrogées ? Ont-elles accès à l'information nécessaire pour faire leur choix en connaissance de cause ? Quand le HCR organise à l'intention des chefs de communauté des voyages dans leur pays d'origine pour évaluer les perspectives de rapatriement, les femmes réfugiées participent-elles à ces missions ?

  • Les femmes ont-elles accès, au même titre que les hommes, aux programmes d'intégration sur place des réfugiés dans le pays d'accueil ? Jouissent-elles du même statut juridique et des mêmes droits (notamment le droit de posséder des terres, le droit d'obtenir un emploi et le droit de devenir économiquement autonomes) que les hommes qui ont été intégrés sur place ?

  • Les femmes ont-elles accès, au même titre que les hommes, aux programmes de réinstallation ? Existe-t-il un mécanisme prévoyant la réinstallation des femmes particulièrement vulnérables dans des pays disposant de programmes spécialement conçus pour les recevoir ? Les administrateurs chargés de la protection et les autres personnes qui sont en rapport avec ces femmes sont-ils au courant des critères appliqués ?

C. Comment et où obtenir des renseignements

27. Les problèmes de protection que rencontrent les femmes réfugiées restent souvent cachés dans la communauté et il n'est pas facile de les mettre au jour. Souvent les femmes réfugiées n'ont pas droit à la parole et leurs problèmes se rapportent à des sujets délicats tels que les agressions sexuelles; c'est pourquoi il faudra souvent chercher à obtenir des renseignements et ne pas attendre que des incidents soient portés à votre attention. Rassemblez systématiquement des renseignements de toutes les sources disponibles sur la situation existante :

  • Interrogez les gens qui travaillent dans des camps ou autres lieux d'installation des réfugiés. Adressez-vous au personnel travaillant dans un large éventail de secteurs (santé, distribution des vivres, enseignement, formation professionnelle, etc.), de même qu'aux personnes officiellement chargées de leur protection. Les responsables au HCR des services sociaux, le personnel des organisations non gouvernementales et celui des ministères de la santé, de l'éducation et des affaires sociales du pays d'accueil, entre autres, disposent de renseignements sur la situation des femmes réfugiées.

  • Sélectionnez aux fins d'interrogatoire, un certain nombre de réfugiés de façon à constituer un groupe représentatif de la population réfugiée. Ne manquez pas d'interroger aussi les femmes, en demandant au personnel féminin de vous aider dans toute la mesure possible à les rencontrer et à les interroger. Posez des questions précises pour favoriser le dialogue. Sollicitez également leur point de vue sur les mesures à prendre pour résoudre les problèmes liés à leur protection. Il faudra peut-être réunir les femmes réfugiées en l'absence des hommes pour obtenir les renseignements nécessaires.

  • Allez observer vous-même sur place les situations que connaissent les femmes réfugiées et la manière dont la vie est organisée dans les camps.

  • Effectuez, le cas échéant, des enquêtes par sondage pour recueillir des renseignements précis auprès des femmes réfugiées.

28. Les méthodes utilisées pour collecter des données et le temps consacré à cet effet varieront selon les cas. Au début d'une situation d'urgence, par exemple, il faudra obtenir les renseignements pertinents le plus vite possible, sans compromettre le déroulement des mesures d'aide d'urgence. Au fur et à mesure que la situation se stabilisera, il sera possible de mieux analyser la situation des femmes réfugiées en matière de protection. Il faut cependant noter l'extrême importance des premiers renseignements obtenus pour définir les politiques et les pratiques qui influeront à long terme sur la sécurité des femmes réfugiées. L'évaluation du caractère d'urgence devrait donc être aussi précise et aussi détaillée que possible sur le plan logistique

D. Evaluation et utilisation de l'information

29. Pour évaluer et utiliser l'information, il faut successivement

  • Enregistrer les renseignements recueillis, en spécifiant leur source/origine et la date.

  • Evaluer les informations pour déterminer si elles sont cohérentes et plausibles.

  • Mettre à Jour les renseignements recueillis de façon continue. Les premiers éléments d'information peuvent être trompeurs. Les besoins évoluent et les priorités changent. Certains problèmes de protection peuvent surgir, qui n'apparaissaient peut-être pas au stade initial du déplacement des réfugiés. D'autres problèmes, peut-être uniquement liés à la fuite, disparaissent dès que les personnes concernées sont établies dans des camps.

  • Tenir compte dans la planification globale des renseignements recueillis et des perspectives définies lors de l'évaluation de la situation des femmes réfugiées en matière de protection afin de renforcer la protection de l'ensemble des réfugiés. Si les problèmes rencontrés sont propres aux femmes réfugiées, élaborer des plans d'action concrets pour y remédier.

  • Faire participer les femmes réfugiées à l'estimation des résultats de l'évaluation et à la formulation de recommandations propres à résoudre les problèmes identifiés.

  • Ne pas généraliser à partir de renseignements concernant seulement une partie de la population ou un seul endroit. L'existence ou l'absence de problèmes de protection en un lieu particulier ou parmi un groupe de réfugiés ne se vérifie pas nécessairement ailleurs. Néanmoins, la constatation de leur existence devrait être un avertissement mettant en garde contre l'apparition de situations analogues en d'autres lieux ou parmi d'autres groupes.

  • Ne pas agir avec précipitation sur la base de l'information initiale ou incomplète recueillie au cours de l'évaluation. Néanmoins il faudra peut-être prendre des mesures immédiates pour remédier aux problèmes de protection précisément identifiés pendant l'évaluation, sans attendre l'achèvement de tout le processus.

  • Consulter, sur les plans établis à partir de l'évaluation en vue de renforcer la protection, un large éventail de groupes, en dehors des femmes réfugiées elles-mêmes - gouvernement, autorités locales, chefs des réfugiés, organisations non gouvernementales, personnel du HCR chargé de l'assistance et autres organismes du système des Nations Unies concernés (notamment le Programme alimentaire mondial (PAM), en ce qui concerne les aspects de la distribution des vivres qui peuvent influer défavorablement sur la protection des femmes réfugiées).

SECTION III : BESOINS EN MATIERE DE PROTECTION ET SOLUTIONS

A. Sécurité physique

30. Si tous les réfugiés connaissent des problèmes de sécurité en raison même de leur situation, les femmes et les personnes à leur charge sont particulièrement vulnérables. Leur sécurité physique est menacée pendant la fuite mais aussi une fois qu'elles ont trouvé un refuge. Même dans le cas des solutions durables, comme le rapatriement ou la réinstallation, elles peuvent également rencontrer des problèmes de protection spécifiques.

i) Problèmes/besoins qui peuvent surgir

a) Agressions et violences physiques et sexuelles pendant la fuite

31. Pour de nombreux réfugiés, les situations de violence qui forcent à l'exode ne sont que le début des épreuves. Sur le chemin de l'asile, les femmes courent le risque d'être violées et enlevées. Pendant la fuite, les femmes et les jeunes filles sont la proie des pirates, des gardes frontière, des membres des troupes régulières de l'armée et des groupes de résistance, des réfugiés hommes et de tout homme qu'elles peuvent rencontrer.

32. Les femmes et les jeunes filles qui ont été séparées des hommes de leur famille dans le désordre de la fuite ou qui ont perdu leur mari pendant la guerre sont particulièrement exposées aux violences physiques et aux viols.

b) Agressions et violences physiques et sexuelles dans les pays d'asile

33. Les femmes et les jeunes filles ne sont pas nécessairement à l'abri des violences une fois qu'elles ont trouvé refuge dans un pays d'asile. Les procédés peuvent être directs, les femmes étant violées ou enlevées, ou plus habiles : une protection, des papiers ou une assistance sont proposés en échange de faveurs sexuelles. Les coupables peuvent être des militaires du pays d'accueil et des membres des forces de la résistance aussi bien que des hommes réfugiés. Les femmes et les adolescentes non accompagnées sont particulièrement exposées à ce genre de violences sexuelles et physiques.

34. Dans de nombreux camps, les installations matérielles sont telles que le risque d'atteintes à la sécurité est accru. Les camps sont souvent surpeuplés. Des familles sans lien de parenté sont parfois obligées de cohabiter. En fait, ce sont des étrangers qui vivent ensemble même des personnes qui pourraient être considérées comme des ennemis héréditaires.

35. L'aménagement des camps peut également contribuer à l'insécurité des femmes et des jeunes filles. Quand les latrines et les installations sanitaires sont éloignées des aires d'hébergement, les femmes courent davantage de risque d'être agressées, surtout la nuit. La plupart des camps ne sont pas éclairés. Les patrouilles de nuit, qui pourraient assurer une plus grande protection, peuvent être absentes ou trop espacées.

36. L'incarcération dans des centres de détention fermés aggrave ces problèmes. Dans certains pays, quiconque entre illégalement ou sans autorisation sur le territoire est placé en détention, indépendamment de son âge ou de son sexe, ou indépendamment du fait qu'il peut avoir demandé le statut de réfugié. Dans certains cas, les femmes et les jeunes filles en quête d'asile sont incarcérées avec des criminels endurcis. Les centres ou camps fermés sont souvent entourés de fil de fer barbelé et ressemblent à des prisons, ce qu'ils sont en réalité, avec l'absence de respect des libertés individuelles propres à l'univers carcéral. Un cadre inhumain peut être propice à des comportements inhumains.

37. Les mécanismes traditionnels de protection des groupes vulnérables peuvent disparaître quand les réfugiés sont contraints de vivre dans de tels camps. En particulier, il est fréquent que les systèmes d'appui communautaire visant à protéger les veuves, les femmes célibataires et les jeunes filles seules ne soient plus organisés. Les femmes âgées et handicapées sont aussi particulièrement vulnérables.

c) Sévices et abandons dont sont victimes les épouses et les enfants

38. Les femmes réfugiées et leurs enfants sont victimes de sévices et d'abandons. L'incidence de la violence dans les ménages augmente souvent quand les réfugiés se trouvent depuis longtemps dans l'environnement artificiel d'un camp de réfugiés. Indiscutablement, les tensions psychologiques que subissent les époux, dans l'impossibilité d'assumer le rôle culturel, social et économique qui leur revient normalement, peuvent conduire à des comportements agressifs à l'égard des femmes et des enfants. L'oisiveté forcée, l'ennui, la frustration et le désespoir que sécrètent un grand nombre de camps de réfugiés engendrent inéluctablement ce genre de violences.

d) Violences imputables aux militaires et enrôlement forcé dans les opérations militaires

39. Certains camps de réfugiés abritent les parents civils des membres des forces armées. Il n'est pas rare que les militaires passent leur congé de détente dans les camps, où ils emportent leurs armes. Le grand nombre d'armes peut aggraver les problèmes de protection. L'enrôlement forcé des femmes et des adolescentes dans les troupes des groupes de résistance représente un problème de plus dans certains pays. Dans certains cas, elles sont recrutées pour servir dans les rangs des soldats. Dans d'autres, les femmes et les enfants sont contraints de porter les munitions et autres fournitures ou encore ils sont employés au déminage.

e) Exploitation sexuelle et prostitution

40. Quand les besoins d'assistance des femmes réfugiées n'ont pas été dûment satisfaits, il en est résulté des conséquences graves du point de vue de l'exploitation sexuelle, qui peut prendre un grand nombre de formes. On a rapporté des cas d'exploitation sexuelle de femmes seules qui cohabitent avec d'autres familles, en particulier quand elles sont censées assumer un rôle conjugal dans leur nouveau foyer. Dans d'autres pays, des femmes réfugiées ont été contraintes de se prostituer, faute d'assistance. La prostitution touche principalement les femmes et les jeunes filles célibataires non accompagnées, ainsi que les femmes chef de famille. Il existe généralement une grande diversité de causes, dont la rupture du tissu social, mais le facteur décisif est l'insuffisance des revenus. Tant que ces femmes ne peuvent pas exercer d'autres activités génératrices de revenus, la prostitution restera probablement une occupation par trop fréquente. Ce problème est aggravé par le fait que, bien souvent, en zone urbaine, les programmes d'assistance sont réduits au minimum, surtout dans le cas de réfugiées résidant illégalement.

41. Les femmes réfugiées dépourvues de papiers sont particulièrement exposées à l'exploitation et aux sévices sexuels. Les femmes ne reçoivent pas systématiquement des papiers attestant qu'elles se trouvent légalement dans le pays. Le chef de famille peut avoir reçu des papiers, mais il n'est pas toujours là. La femme réfugiée sans papiers qui est arrêtée par une patrouille de l'armée ou de la police peut se retrouver en prison même si elle est autorisée à résider dans le pays. Il peut également arriver qu'elle soit dans l'impossibilité d'obtenir une assistance internationale ou une autorisation de travailler sans les papiers requis, et en soit réduite à se prostituer ou à se livrer à d'autres activités illégales pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille.

f) Protection physique pendant le rapatriement

42. Quand elles rentrent dans leur pays, les femmes et les adolescentes réfugiées retrouvent bon nombre des problèmes de protection qu'elles ont connus pendant la fuite et dans les pays d'asile. Dans la majorité des cas, les rapatriements sont spontanés, et se déroulent donc en l'absence d'organisations internationales. Souvent, le pays d'origine est encore dans une situation politique et militaire instable. L'insécurité physique et tous les dangers que la femme a affrontés à l'aller peuvent se présenter à nouveau quand elle revient du pays d'asile. De plus, une fois de retour dans sa ville ou son village d'origine, elle peut tomber entre les mains des forces militaires qui contrôlent la zone et être victime de violences ou d'exploitation. Elle peut alors éprouver des difficultés pour se plaindre auprès du personnel du HCR qui veille à la sécurité des rapatriés, sauf s'il y a une femme parmi les responsables de la protection.

g) Difficultés rencontrées pour poursuivre les délinquants

43. L'expérience prouve qu'il est généralement difficile de poursuivre ceux qui agressent ou exploitent les femmes. Celles-ci hésitent souvent à parler des agressions dont elles ont été victimes et à subir l'épreuve traumatisante et parfois dangereuse consistant à identifier les coupables et à témoigner contre eux. Les responsables peuvent occuper des positions qui leur confèrent une autorité et ceux qui représentent les intérêts des femmes ne peuvent pas, ou ne veulent pas, leur en demander raison. On a connaissance d'au moins un cas - une attaque de pirates - où des poursuites engagées ont amené les agresseurs à tuer les témoins oculaires qui pouvaient déposer contre eux, d'où un risque accru pour les femmes.

ii) Interventions possibles au titre des programmes

a) Participation des femmes réfugiées

44. Il importe d'assurer la participation des femmes réfugiées aux décisions touchant à leur sécurité. Les décisions pour lesquelles il faut prendre leur avis portent notamment sur les questions suivantes : identification des situations particulièrement dangereuses, mise au point de mécanismes permettant de mieux signaler les problèmes liés à la protection physique et sexuelle; programmes visant à renforcer la protection fondée sur des mécanismes de protection traditionnels qui ont fait la preuve de leur efficacité et évitent des pratiques néfastes; amélioration de l'aménagement des camps et mise en oeuvre de programmes d'assistance afin de renforcer la sécurité; et conception de programmes destinés à répondre aux besoins des victimes.

b) Conception et mise en oeuvre de programmes d'assistance permettant de réduire les risques

45. Certaines améliorations apportées aux programmes d'assistance peuvent accroître la protection des femmes et des jeunes filles réfugiées :

  • Déterminer et apporter les changements nécessaires à l'aménagement des camps et à la façon dont leur emplacement est choisi afin de renforcer la sécurité physique. Adopter les mesures spéciales qui peuvent s'imposer, notamment prévoir des patrouilles de sécurité; prévoir, si besoin est, des logements à part pour les femmes célibataires, les femmes chef de famille et les jeunes filles seules; améliorer l'éclairage.

  • Limiter l'utilisation d'installations ou de centres de détention fermés où les réfugiées risquent d'être victimes de violences.

  • S'occuper des questions de protection, qui se posent dans le cas particulier des femmes, dans tous les autres secteurs des programmes en faveur des réfugiés, comme les programmes concernant la santé et la nutrition, et prévoir une information sur la situation, les besoins et les droits des femmes réfugiées dans les activités d'enseignement menées à bien dans le cadre des programmes en faveur des réfugiés (voir section IV).

  • Veiller à ce que les femmes réfugiées aient les papiers d'identité voulus et aient accès à toutes les procédures d'enregistrement utilisées pour déterminer si le réfugié a droit à une assistance.

c) Groupes vulnérables

46. Certaines catégories de femmes réfugiées sont particulièrement exposées à des dangers et méritent une protection particulière : par exemple, les adolescentes et les femmes non accompagnées, les femmes âgées et les handicapées :

  • Identifier les femmes qui entrent dans ces groupes vulnérables et déterminer si elles connaissent des problèmes particuliers en matière de protection.

  • Réfléchir, en consultation avec les femmes réfugiées, aux moyens de répondre à leurs besoins particuliers. Par exemple, pour les femmes seules, on peut envisager de créer une aire d'hébergement à part. Aux femmes âgées et aux femmes handicapées, on peut attribuer un logement plus près des services.

d) Dotation en personnel permettant de garantir une plus grande protection

47. En modifiant la composition, la formation et l'affectation du personnel, on peut promouvoir la protection des femmes réfugiées :

  • Poster du personnel international qualifié, dont du personnel féminin, dans les zones frontière que les femmes réfugiées doivent traverser avant d'arriver dans les pays d'asile, ainsi que dans les centres d'accueil, les camps de réfugiés et les zones d'installation. Le personnel des ONG et des institutions des Nations Unies peuvent seconder efficacement le HCR dans le domaine de la protection en décelant les problèmes et, par leur présence même, en jouant un rôle de prévention.

  • Employer des femmes pour occuper les fonctions d'administrateurs chargés de la protection, aux frontières ainsi qu'à l'intérieur des camps de réfugiés et autres lieux d'installation. Les femmes peuvent hésiter à dénoncer des agressions, en particulier de caractère sexuel, à du personnel masculin.

  • Employer des interprètes femmes et leur donner une formation dans le domaine de la protection des femmes.

  • Assurer la formation du personnel du HCR, du personnel des ONG, des gardes frontière des pays d'accueil, de la police, des groupes militaires et de toute autre personne qui peut avoir affaire à des réfugiés. La formation doit porter notamment sur les droits des femmes réfugiées en droit international, sur la responsabilité qu'ont les pays d'accueil de protéger ces droits et sur les mesures spécifiques qui peuvent être prises pour renforcer la protection des femmes réfugiées se trouvant dans leur juridiction. Il faut mettre l'accent sur la prévention des problèmes.

e) Protection pendant le rapatriement

48. Il faut faire en sorte que ceux qui veillent à la protection des rapatriés s'attachent en priorité à évaluer la sécurité des femmes réfugiées.

f) Assistance aux victimes

49. L'un des volets de la protection consiste à trouver des moyens de recours appropriés pour les victimes d'atteintes à la sécurité physique. Ces moyens de recours permettent non seulement d'aider les individus mais aussi de mieux définir et mettre en oeuvre des mesures de prévention. Il faut notamment prendre les mesures suivantes :

  • Employer des travailleurs sociaux et communautaires chargés de s'entretenir directement avec les femmes et de définir les moyens de recours ouverts aux victimes de violences physiques et de sévices sexuels et de leur en faciliter l'accès. Offrir des conseils tenant compte des caractéristiques culturelles aux femmes réfugiées victimes de sévices (voir section IV).

  • Réinstaller d'urgence, si besoin est, les femmes réfugiées qui peuvent être particulièrement exposées aux risques d'agression. Dans certains cas, la meilleure solution pour la femme victime d'une agression sera de quitter l'endroit où l'agression a eu lieu. Les programmes en faveur des groupes de femmes particulièrement exposées mis en oeuvre par un certain nombre de pays de réinstallation pour faciliter l'entrée sur leur territoire de femmes en situation spécialement difficile, peuvent permettre à ces femmes d'être réinstallées dans des endroits où elles bénéficieront des services et de l'assistance voulus. La solution du rapatriement librement consenti doit également être envisagée, surtout si la famille de l'intéressée se trouve toujours dans le pays d'origine et est disposée à l'aider à se réintégrer.

  • Assurer le regroupement des familles dont les membres sont répartis dans plusieurs camps ou sont séparés à l'intérieur d'un même camp, afin de diminuer le nombre de femmes et de jeunes filles seules, donc vulnérables.

g) Application de la loi dans les pays d'asile

50. Il faut mettre en place des mécanismes efficaces visant à garantir que les responsables d'infractions à la loi sont identifiés et poursuivis. Il est essentiel d'en planifier minutieusement la conception.

h) Codes et procédures juridiquement applicables à l'intérieur des camps

51. Il faut revoir les codes et les procédures juridiques adoptés dans les camps afin de s'assurer que les problèmes des femmes réfugiées en matière de protection sont bien traités et que les femmes ont accès, en toute égalité, aux recours prévus devant les tribunaux institués. Il faut aussi encourager l'adoption de règles à cet usage, encourager la participation des femmes réfugiées à la conception et à la mise en oeuvre des procédures et assurer une formation au personnel chargé de les appliquer.

i) Education et information

52. Informer les femmes réfugiées de leurs droits et inculquer à tout homme susceptible de commettre des violences à l'encontre des femmes le sens de ses responsabilités peuvent contribuer grandement à prévenir les problèmes de protection :

  • Informer les femmes réfugiées des droits qui sont les leurs en vertu du droit international et des législations nationales.

  • Travailler en collaboration avec les ONG afin de mettre au point des programmes et du matériel d'information à l'intention des réfugiés, femmes et hommes, du personnel des ONG, du personnel des gouvernements et autres, selon les besoins, sur les droits des femmes réfugiées et sur la nécessité de leur assurer une protection physique.

B. Procédures et critères juridiques à appliquer pour déterminer le statut de réfugié

53. Déterminer le statut de réfugié est un élément fondamental pour fournir aide et protection aux réfugiés. Dans de nombreux pays, il existe des procédures élaborées qui servent à déterminer le statut de réfugié au cas par cas. En leur absence, ou selon les exigences de la situation, on peut procéder à une première détermination approximative par groupes. En outre, le HCR protège les individus ou les groupes qui relèvent de sa compétence, d'après son mandat et les directives de l'Assemblée générale.

i) Problèmes/besoins qui peuvent surgir

a) Les motifs prévus pour prétendre au statut de réfugié ne comprennent pas le sexe

54. Selon la définition de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, le terme de réfugié s'applique à toute personne qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou ne veut y retourner parce qu'elle craint avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques (article premier, par. A 2). Le cas de la femme qui demande le statut de réfugié parce qu'elle craint des traitements cruels ou inhumains pour avoir transgressé les lois ou les coutumes de la société de son pays concernant le rôle de la femme n'entre pas exactement dans cette définition. Comme l'a noté un conseiller juridique du HCR, la transgression des règles sociales n'est pas prévue dans la définition universelle du réfugié. Pourtant, on connaît des cas de violences subies par des femmes accusées d'avoir transgressé les règles sociales, dans un certain nombre de pays. L'infraction peut aller de l'adultère au port de rouge à lèvres. La peine peut être la mort. Le Comité exécutif du HCR a encouragé les Etats à considérer les femmes ainsi persécutées comme un « groupe social » de façon à garantir leur prise en compte dans la détermination du statut de réfugié mais les pays sont entièrement libres de suivre ou de ne pas suivre cette recommandation.

55. Les femmes peuvent aussi fuir leur pays parce qu'elles sont victimes de discrimination sexuelle grave, soit de la part des organes officiels, soit dans les communautés locales. Ne pas être soumise à une discrimination fondée sur le sexe est un droit fondamental pour toutes les femmes, consacré dans un certain nombre de déclarations et de conventions internationales. Si ce droit est universellement reconnu et s'il est vrai que la discrimination peut, dans certaines circonstances, constituer une persécution, la ligne de démarcation entre la discrimination et la persécution n'est pas nette.

56. Il peut être difficile pour une femme agressée par un membre des forces armées de prouver qu'elle est victime de persécution et non pas d'un acte de violence isolé. Même les femmes violées par des militaires ont des difficultés à obtenir le statut de réfugié si les responsables de leur dossier considèrent de telles agressions comme des actes de guerre « normaux ». Les femmes victimes de brimades en raison des activités politiques d'un de leurs proches de sexe masculin éprouvent des difficultés particulières à prouver qu'elles sont fondées à demander le statut de réfugié. Or, dans de nombreux conflits, les agressions contre les femmes de la famille des combattants font partie intégrante des campagnes de terreur.

b) Possibilité d'être entendue

57. Parfois, les femmes qui arrivent avec d'autres membres de leur famille ne sont pas interrogées ou ne sont interrogées que sommairement sur leur propre expérience, même s'il est possible que ce soit elles, et non pas leurs maris, qui aient été la cible de persécutions. Les hommes de la famille n'abordent pas toujours les questions pertinentes parce qu'ils ignorent les détails ou ont honte d'en faire état.

c) Entretiens préalables à la détermination du statut de réfugié

58. Les femmes ont des difficultés particulières pour plaider leur cause auprès des autorités, surtout si elles ont traversé des expériences éprouvantes et douloureuses à raconter.

59. Les persécutions dont les femmes sont victimes prennent souvent la forme d'agressions sexuelles. Les méthodes de torture suivantes peuvent être pratiquées : viol, application de courant électrique sur les organes génitaux, stimulation mécanique des zones érogènes, stimulation manuelle des zones érogènes, introduction d'objets en métal ou autre dans les orifices naturels suivie de l'application de courant électrique, pratiques consistant à contraindre la personne à assister à des relations sexuelles « contre nature », à se masturber ou à se faire masturber; actes sexuels buccaux; enfin, atmosphère générale d'agression sexuelle et menace de devenir stérile et de ne plus jamais pouvoir avoir de relations sexuelles.

60. Il est évident que la victime de ce genre de tortures sexuelles aura de la réticence ou de grandes difficultés à en parler, surtout à un homme. Le viol, même accompagné d'actes de torture, est considéré dans certaines cultures comme une faute de la part de la femme qui n'a pas su préserver sa virginité ou son honneur conjugal. La famille de la victime peut alors l'éviter et l'isoler des autres membres de la communauté. En parlant de son expérience, elle s'aliène encore davantage.

61. Un autre problème se pose quand les femmes sont interrogées à propos de la demande du statut de réfugié formée par un proche de sexe masculin. L'épouse pourra être interrogée surtout pour confirmer les récits de son mari; si elle en ignore les détails (par exemple le numéro de l'unité de l'armée à laquelle il appartenait) tout le témoignage peut être disqualifié pour manque de crédibilité. Or, dans de nombreuses cultures, les hommes ne donnent pas beaucoup de détails à leur femme au sujet de leurs activités militaires ou politiques.

d) Inégalités dans l'octroi du statut de réfugié

62. Les femmes réfugiées rencontrent un autre problème juridique découlant du statut qui leur est octroyé dans la pratique par le pays d'asile. Dans la plupart des pays, les proches qui accompagnent ou rejoignent par la suite un exilé qui a obtenu le statut de réfugié, reçoivent le même statut. Mais cette pratique n'est pas générale. De même, dans certains pays d'asile, la reconnaissance du statut de réfugié n'est pas automatique pour l'épouse et les enfants qui arrivent après le réfugié. Le regroupement des familles n'est pas un droit prévu dans la Convention de 1951; c'est une pratique recommandée qui dépend pour une large part du bon vouloir des Etats. Si beaucoup d'entre eux autorisent les membres de la famille du réfugié à immigrer, certains, en revanche, octroient un statut de résidence qui assure une protection moindre contre les expulsions que le statut de réfugié. En cas de séparation de la famille, l'épouse (c'est le plus souvent elle qui rejoint le conjoint ayant obtenu le statut de réfugié) peut se retrouver totalement démunie contre le risque de renvoi. Or elle peut avoir des raisons aussi impérieuses que son mari de demander le statut de réfugié. S'il s'est écoulé un certain temps depuis les événements rapportés par son conjoint ou si elle ignore certains détails, elle peut être dans l'incapacité de plaider sa cause de façon convaincante.

e) Absence de papiers d'identité

63. Souvent, les pays d'asile ne disposent pas de moyens suffisants pour enregistrer les réfugiés, même ceux qui ont l'autorisation de rester sur le territoire, et pour leur délivrer des papiers d'identité. Parfois, le pays d'asile enregistre l'homme qui est chef de famille et lui donne des papiers d'identité mais ne fournit pas d'attestation de résidence aux autres membres de la famille. Si l'homme abandonne la famille ou s'il est absent pour une raison quelconque, il est difficile, voire impossible, pour l'épouse de prouver qu'elle réside légalement dans le pays.

64. L'enregistrement des mariages, des naissances et des décès constitue un autre problème pour de nombreuses familles de réfugiés. Dans certains pays, il n'existe pas de procédure de déclaration officielle des mariages et des naissances ou même des décès survenant dans les camps de réfugiés. Dans d'autres, il peut en exister dans les camps mais rien n'est prévu pour ceux qui se sont installés spontanément. Autres cas possibles : les réfugiés urbains peuvent faire enregistrer leurs enfants mais rien n'est prévu dans les zones d'installation rurales. Il peut arriver aussi que les procédures existent mais que les réfugiés hésitent à en faire usage de peur d'attirer l'attention des autorités.

65. L'apatridie est un problème rencontré par nombre de jeunes filles réfugiées. Dans certains cas, il y a conflit entre les législations nationales régissant l'attribution de la nationalité. Le pays d'asile peut considérer qu'un enfant né sur son territoire doit avoir la nationalité de ses parents et le pays d'origine des parents peut considérer, de son côté, que l'enfant ne peut pas avoir la même nationalité s'il est né sur le sol d'un autre Etat.

66. Même quand elles obtiennent légalement des papiers d'identité, les femmes réfugiées se heurtent à des obstacles particuliers pour faire les démarches d'enregistrement, en particulier si elles sont chef de famille. Elles rencontrent ainsi des difficultés matérielles et logistiques pour parvenir jusqu'aux services responsables, notamment si leur culture interdit aux femmes de traiter avec des étrangers, ainsi que des problèmes liés au manque d'information sur les prestations auxquelles elles ont droit, quand elles sont célibataires ou chef de famille.

67. L'absence d'enregistrement crée de nombreux problèmes d'ordre psychologique et pratique, en particulier pour les femmes réfugiées qui assurent en premier lieu les soins à la famille. L'enregistrement est nécessaire non seulement pour établir le statut juridique, l'âge et la nationalité mais aussi, en de nombreux endroits, pour obtenir une assistance.

f) Décision concernant le rapatriement

68. Ce sont souvent les chefs de camp qui prennent les décisions concernant le retour dans le pays et les femmes n'ont guère la possibilité de donner leur avis en tant que groupe ou en tant qu'individu. Dans certains cas, les femmes qui voudraient rentrer chez elles ne le peuvent pas parce que les hommes, chefs du camp, en ont décidé autrement. Les femmes et les enfants sont de fait prisonniers des groupes de résistance qui contrôlent ces camps. Dans d'autres cas, les femmes peuvent être obligées de rentrer « volontairement » au pays parce qu'il en a été décidé ainsi en leur nom ou parce que l'aide a été réduite, que les conditions de vie sont mauvaises et qu'elles sont victimes de violences physiques. Pour compliquer les choses, les femmes ne sont pas toujours suffisamment informées pour faire un choix éclairé, quand elles ont le choix

g) Intégration sur place

69. Il arrive que les réfugiés intégrés dans une communauté d'un pays de premier asile n'aient pas la jouissance intégrale des droits reconnus par la loi ou des droits politiques. Même ceux qui sont nés dans les zones d'installation peuvent être dans cette situation. En fait, les résidents demeurent des réfugiés à leur nouveau domicile. Faute de pouvoir exercer certains droits, les femmes réfugiées ne peuvent pas atteindre à l'autonomie économique complète car elles peuvent se voir refuser l'accès aux marchés, et dénier le droit à la propriété des terres et des commerces, le droit de se déplacer librement dans le pays, etc. L'accès à l'emploi et les compléments de revenus pour les familles nécessiteuses représentent également un problème pour les réfugiées installées dans les pays d'asile. Parfois, le permis de travail qui leur est délivré est assorti de restrictions concernant les activités qui peuvent être exercées (par exemple seuls les travaux domestiques sont autorisés) et de conditions strictes relatives à l'âge et à la condition physique; souvent, la protection de l'emploi est très limitée. Ce sont tout particulièrement les femmes sans qualifications qui sont réduites, en raison des conditions économiques, à cette situation d'exploitation.

70. Les femmes réfugiées qui se sont installées spontanément, en particulier en zone urbaine, se heurtent même à des difficultés supplémentaires. Il est souvent impossible d'obtenir une résidence légale, surtout dans le cas où les gouvernements cherchent à décourager l'installation dans les villes. Même en zone rurale, il est fréquent que les réfugiés installés spontanément n'aient pas de carte d'identité, ce qui restreint leur accès aux services. Il ressort d'un certain nombre de rapports consacrés à la prostitution chez les réfugiées que ce sont les femmes sans résidence légale qui risquent le plus de se prostituer.

ii) Interventions possibles au titre des programmes

a) Motifs d'octroi du statut de réfugié aux femmes

71. Si les divers motifs pour lesquels les femmes peuvent et doivent se voir accorder le statut de réfugié sont mieux compris, il y aura plus de chances que leur cause soit entendue équitablement :

  • Donner aux femmes au même titre qu'aux hommes d'une famille la possibilité de fournir des renseignements utiles pour la détermination du statut de réfugié.

  • Faire accepter l'idée, par ceux qui sont chargés de déterminer le statut, que les femmes qui craignent d'être persécutées ou d'être victimes d'une discrimination grave au motif de leur sexe doivent être considérées comme appartenant à un groupe social aux fins de détermination du statut de réfugié. Dans certains cas, on peut aussi considérer qu'elles ont pris une position, religieuse ou politique, qui transgresse les règles sociales de leur communauté.

  • Faire accepter l'idée que les violences sexuelles dont les femmes sont victimes sont une forme de persécution quand elles sont le fait d'individus agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles, ou avec leur consentement, à titre de mesure d'intimidation ou de sanction.

  • Faire reconnaître qu'il peut être justifié d'accorder le statut de réfugié quand le gouvernement ne peut ou ne veut pas protéger les femmes qui sont victimes de violences pour avoir transgressé des règles sociales. Il n'est pas nécessaire que le gouvernement soit lui-même responsable des violences.

b) Entretiens

72. Il peut être nécessaire de recourir à diverses méthodes qui tiennent compte de la sensibilité féminine pour obtenir des renseignements lors de l'entretien préalable à la détermination du statut de réfugié. Le recrutement et la formation d'interprètes femmes est une condition essentielle au bon déroulement de l'entretien :

  • Etudier le module de formation qui a été élaboré sur les entretiens avec les réfugiés.

  • Avoir conscience des différences entre hommes et femmes dans les modes de communication, en particulier des modes d'expression non verbaux. En interrogeant, éviter les gestes intimidants qui inhibent le sujet dans ses réponses. En évaluant la bonne foi de la femme qui demande le statut de réfugié, par exemple, ne pas juger en fonction de valeurs culturelles occidentales comme la capacité de soutenir un regard.

  • Etre patient avec les femmes réfugiées et attendre qu'elles parviennent à surmonter leurs inhibitions, en particulier en ce qui concerne les sévices sexuels. Il faudra peut-être poser la même question de différentes manières avant que la victime d'un viol ou d'autres sévices puisse raconter son histoire. Pendant les entretiens, il faut laisser à la femme le temps d'établir une relation avec la personne qui l'interroge afin qu'elle puisse faire son récit. Ne pas demander de détails concernant les sévices sexuels; l'important pour déterminer si la peur de la persécution est fondée est d'établir qu'une forme quelconque de sévice a bien été subie.

  • Reconnaître chez les femmes qui ont subi une agression sexuelle un ensemble de symptômes connus comme le « syndrome du traumatisme de viol ». Ce sont la crainte permanente, la perte de confiance en soi et la dévalorisation, la difficulté de concentration, une attitude de culpabilité, un sentiment diffus de perte de contrôle, la perte de la mémoire ou la distorsion des souvenirs. Ces symptômes influeront sur la façon dont la femme répond aux questions. S'ils sont mal compris, ils peuvent être perçus à tort comme ôtant au témoignage sa véracité.

  • Comprendre que, dans beaucoup de sociétés, les femmes ne sont pas informées en détail des activités des hommes de la famille. Ce n'est pas parce qu'elles ignorent certaines choses que l'ensemble de leur récit est mensonger, sauf si d'autres indices tendent à le montrer.

  • S'organiser pour que les femmes puissent être interrogées seules, sans risquer d'être entendues d'autres membres de leur famille. Les victimes d'agressions sexuelles ne seront pas à l'aise si elles doivent raconter leur expérience devant leurs père, époux, frères ou enfants.

c) Facteurs propres au pays d'origine, qui peuvent affecter les femmes

73. Les responsables de l'attribution du statut de réfugié devraient être au fait de la condition féminine dans le pays que la réfugiée a quitté et de ce que les femmes peuvent vivre dans ce pays. Les personnes chargées des entretiens devraient ainsi être au courant notamment des éléments suivants.

  • la position de la femme devant la loi, notamment sa situation concernant la justice, le droit de porter plainte et de témoigner, les dispositions législatives régissant le divorce et le droit de garde, le droit à la propriété privée, le droit d'avorter ou de refuser de se faire avorter;

  • les droits politiques de la femme, notamment le droit de vote, le droit d'occuper une charge et le droit d'appartenir à un parti politique;

  • les droits sociaux et économiques de la femme, notamment le droit d'épouser la personne de son choix, le droit de faire des études, d'embrasser une carrière et d'occuper un emploi ou de travailler à des activités rémunérées, le statut de la veuve ou de la femme divorcée et la liberté d'habillement;

  • l'incidence des violences connues contre les femmes, les formes qu'elles prennent (par exemple agressions sexuelles, exécutions pour « laver l'honneur », immolation par le feu des futures ou jeunes mariées), la protection assurée aux femmes et les sanctions ou peines infligées à ceux qui se rendent coupables de violences;

  • les risques encourus par la femme qui retourne dans son pays, eu égard à la situation qu'elle a décrite en faisant sa demande de statut de réfugié.

d) Rapatriement et intégration sur place

74.

  • Mettre au point des programmes permettant aux femmes d'avoir accès, en toute égalité, aux procédures de rapatriement librement consenti afin que celles qui souhaitent rentrer dans leur pays puissent le faire et que celles qui, au contraire, en ont peur, soient protégées contre le refoulement.

  • Informer tous les réfugiés, hommes et femmes, de façon qu'ils puissent décider en toute connaissance de cause de retourner ou non dans leur pays.

  • Evaluer la situation juridique de la femme réfugiée intégrée dans une communauté locale, en prêtant une attention particulière aux dispositions juridiques qui restreignent les droits des femmes. Si ces dispositions entraînent l'exploitation de la femme réfugiée ou l'empêchent de devenir économiquement autonome, évaluer les plans du HCR prévoyant une assistance provisoire aux réfugiés et aux communautés dans lesquelles ils s'intègrent afin d'apporter, le cas échéant, les changements nécessaires.

e) Dotation en personnel et formation

75.

  • Employer des femmes pour procéder aux entretiens préalables à la détermination du statut de réfugié et pour servir d'interprètes. Les questions très délicates et personnelles que soulèvent les violences sexuelles exigent la présence de fonctionnaires sensibles aux besoins des femmes réfugiées. Dans bien des cas, il faudra du personnel féminin qui puisse s'entretenir avec les victimes des expériences qu'elles ont personnellement vécues.

  • Assurer à toutes les personnes chargées des entretiens et de l'octroi du statut de réfugié une formation qui tienne compte de la sensibilité féminine. Les fonctionnaires de l'immigration qui déterminent le statut de réfugié devraient recevoir une formation spécifique sur la façon de conduire un entretien et d'évaluer la demande des femmes en quête d'asile.

f) Enregistrement et délivrance de papiers d'identité

76. Il convient de mettre en place des procédures permettant aux femmes d'avoir accès, en toute égalité, aux procédures d'enregistrement et de recevoir les papiers d'identité voulus. S'il n'est pas possible de délivrer à chaque membre d'une famille des papiers individuels, les femmes adultes devraient avoir la priorité dans l'attribution des attestations nécessaires pour obtenir une assistance.

SECTION IV : LA PROTECTION PAR L'ASSISTANCE

A. Introduction

77. La protection ne peut être considérée indépendamment des mécanismes mis en place pour l'assistance aux réfugiés. Depuis les premières décisions prises sur la conception et l'aménagement des camps jusqu'aux programmes à plus long terme destinés à aider les réfugiés à trouver des solutions durables, les choix opérés dans les secteurs d'assistance ont de profondes répercussions sur la protection des femmes réfugiées. Dans le cadre de sa fonction de protection, le HCR a pour tâche d'assurer l'accès de tous les réfugiés, sans discrimination, à ses programmes d'assistance. Au-delà de cette tâche, l'assistance du HCR doit permettre de soutenir l'action menée pour garantir la sécurité et la dignité des femmes réfugiées et répondre aux besoins de celles qui ont déjà été victimes d'atteintes à l'une ou à l'autre.

78. Les questions et les recommandations décrites ci-après à l'intention des aménageurs des camps et des administrateurs des programmes d'assistance sont très proches des problèmes de protection et des interventions possibles décrits à la section III. On doit y voir un complément aux mesures qui ont été recommandées aux responsables de la protection.

B. Conception et aménagement des camps

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

79. Les conditions matérielles d'hébergement des réfugiés influent sur leur sécurité. Trop souvent, les femmes réfugiées sont confrontées à des dangers découlant d'une mauvaise conception des camps, tels l'hébergement en commun qui n'assure pas aux femmes une intimité suffisante; l'emplacement des services et des installations de base, des latrines notamment, que leur distance par rapport aux endroits où elles sont logées rend peu sûrs; l'éclairage médiocre des camps qui fait que des agressions peuvent se produire dans une relative impunité; la construction de barrières, voire le minage du périmètre des camps, même quand les réfugiées doivent aller au-delà pour se procurer du bois à brûler ou d'autres articles.

80. Dans beaucoup de situations de réfugiés, des personnes étrangères les unes aux autres sont rassemblées dans un cadre nouveau. Souvent, rien n'est fait pour reconstituer les communautés traditionnelles lorsqu'on décide des camps où seront envoyés les individus et les familles ou de l'endroit, à l'intérieur d'un camp, où telle ou telle personne vivra. Les campements peuvent atteindre les dimensions d'une grande ville, donnant ainsi aux réfugiés leur première expérience de la vie urbaine. Les femmes non accompagnées et les femmes chefs de famille sont parfois mêlées à des hommes célibataires dans des conditions qui sapent les efforts entrepris dans le domaine de la protection. Les mécanismes qui, traditionnellement, assurent l'ordre dans une communauté, peuvent disparaître du fait de l'expérience que vivent les réfugiés.

Interventions possibles au titre des programmes

81. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes :

  • Maintenir, dans la mesure du possible, au nouvel emplacement choisi la communauté initiale du pays d'origine.

  • Consulter les réfugiés sur l'organisation matérielle et sociale du camp. Veiller à ce que les femmes soient alors consultées et, si la chose est faisable, à ce que du personnel féminin s'entretienne avec les travailleurs communautaires.

  • Veiller à ce qu'à l'emplacement choisi, les services/installations de base soient situés de manière à ne pas exposer les femmes réfugiées à des agressions quand elles doivent les utiliser.

  • Constituer des patrouilles de sécurité, composées de préférence de personnes de confiance dans la communauté des réfugiés, pour garder le campement la nuit, la protection des femmes réfugiées devant être assurée en priorité.

  • Améliorer l'éclairage lorsque c'est possible, en particulier sur les chemins empruntés la nuit par les femmes pour utiliser les services/installations.

  • Accorder un rang de priorité particulier à l'évaluation des besoins de protection des femmes réfugiées non accompagnées, des femmes chef de famille, des femmes âgées et handicapées, en les consultant afin de déterminer les meilleures dispositions à prendre pour l'hébergement.

  • Rechercher et promouvoir des solutions de remplacement aux camps lorsque c'est possible, en particulier aux camps fermés et aux centres de détention. Les séjours prolongés dans les camps peuvent faire disparaître l'ordre qui régnait auparavant.

C. Accès aux vivres et autres articles distribués

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

82. L'égalité d'accès aux vivres et autres articles distribués est capitale pour les femmes réfugiées. La principale cause de mortalité dans les camps de réfugiés est la malnutrition. La carence alimentaire tue par elle-même et compte pour beaucoup dans les décès provoqués par de nombreuses maladies. Une population sous-alimentée est moins résistante à la maladie et plus difficile à soigner. Les femmes enceintes ou allaitantes sous-alimentées sont incapables de fournir à leurs enfants des éléments nutritifs en suffisance pour leur permettre de survivre. Les personnes privées de l'essentiel, c'est-à-dire d'un abri, de vêtements et d'ustensiles de cuisine, sont en outre plus exposées à la maladie.

83. Les décisions relatives à la distribution des vivres et autres articles sont généralement prises par les organisations internationales et les pays d'accueil, en consultation avec les hommes qui sont à la tête des camps. Pourtant, ces chefs ne connaissent guère les besoins et la situation des personnes qui font la cuisine, nourrissent ou vêtent leur famille : les femmes. Aussi, les modes de distribution et le contenu des paniers de nourriture sont-ils parfois inadaptés; fourniture de produits étrangers aux habitudes alimentaires des réfugiés, ou de produits exigeant une préparation difficilement réalisable dans le cadre d'un camp. A ces problèmes viennent s'ajouter les pratiques culturelles de certaines populations réfugiées, qui veulent que les hommes soient nourris en premier. Quand l'approvisionnement est limité, les femmes et les enfants ne reçoivent pas toujours des aliments en suffisance et sont donc les premières victimes.

84. La prédominance d'une distribution de vivres où les hommes ont la suprématie est manifestement contraire aux schémas traditionnels voulant que les femmes jouent un rôle de premier plan dans la production alimentaire. Selon la Banque mondiale, les femmes produisent 70 % des cultures vivrières des pays en développement. Bien que la situation varie quelque peu selon les régions, les femmes de ces pays participent aussi de manière habituelle à l'élevage du bétail, aux activités ayant pour objet de stocker les vivres et de vendre et échanger les produits ainsi qu'à la préparation et à la cuisson des aliments. En Afrique, les femmes sont souvent les seuls cultivateurs alors qu'en Asie, la culture pratiquée en commun par les époux est plus répandue. En Amérique latine, les femmes tendent à prendre la place de leur mari quand il se met en quête d'un emploi en ville qui complétera le travail de la terre.

85. Dans certains cas, les vivres distribués des réseaux masculins ont été détournés au profit des forces de la résistance ou pour être vendus au marché noir, au détriment des femmes et des enfants. Dans d'autres, on s'en sert comme d'une arme pour bloquer la distribution aux populations civiles. Dans d'autres encore, les hommes distribuant les vivres et autres produits ont exigé des « faveurs sexuelles » en échange des biens fournis dans le cadre de l'assistance.

Interventions possibles au titre des programmes

86. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes :

  • Consulter les femmes réfugiées sur toutes les décisions concernant les vivres et autres articles distribués.

  • Choisir des femmes réfugiées comme point de contact initial pour la distribution des vivres en situation d'urgence et à plus long terme. La distribution directe aux femmes peut réduire les détournements au profit des militaires et augmenter les chances de voir les produits alimentaires parvenir à la population réfugiée. Elle contribue aussi à éviter aux femmes d'avoir à accorder des « faveurs sexuelles » pour obtenir de la nourriture.

  • Surveiller l'état nutritionnel des femmes et des enfants afin de déceler les problèmes éventuels dans la distribution de produits alimentaires. En présence de carence nutritive ou d'un état nutritionnel déficient, il convient de prendre immédiatement des mesures pour revoir la politique de distribution de vivres et sa mise en application afin de vérifier qu'elle n'a pas d'effet et offre bien un accès égal à tous les réfugiés.

  • Offrir aux femmes réfugiées des possibilités de produire, échanger ou acquérir d'une autre manière de quoi se nourrir et nourrir leur famille et, le cas échéant, la formation nécessaire à cet effet.

D. Eau et bois à brûler

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

87. Outre la malnutrition, la médiocrité de l'hygiène et la contamination de l'eau expliquent les taux de mortalité élevés dans de nombreuses situations de réfugiés. Il faut absolument améliorer les techniques employées par la communauté pour obtenir de l'eau pure. Les femmes dans les camps de réfugiés, comme beaucoup d'autres femmes des pays en développement passent une grande partie de leur temps à quérir de l'eau. Des conteneurs trop lourds ou des pompes mal situées peuvent rendre ce travail plus pénible. De même, le ramassage de combustible de cuisine et de chauffage est une tâche qui incombe en général aux femmes. Dans une situation de réfugiés, la recherche d'eau ou de bois à brûler non seulement prend du temps (s'ils se trouvent à une certaine distance des camps), mais est encore dangereuse (s'il faut aller les chercher dans des zones infestées de mines ou sur les lieux du conflit).

Interventions possibles au titre des programmes

88. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes :

  • Consulter les femmes réfugiées sur la nature et l'emplacement des points d'eau et sur les conteneurs destinés au transport de l'eau.

  • Consulter les femmes réfugiées sur le lieu et les modes de ramassage du combustible de cuisine et de chauffage.

  • Surveiller les points d'eau et les points de ramassage du combustible afin qu'ils soient sûrs et accessibles.

E. Accès à des soins de santé appropriés

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

89. L'accès des femmes réfugiées aux services de soins de santé est important tant pour leur santé propre que pour le bien-être de la communauté en général. Les femmes sont aussi les principales dispensatrices de soins de santé aux autres membres de la famille. Ainsi, la santé des autres membres de la famille dépend directement des connaissances de la mère ou de l'intérêt qu'elle porte à la promotion d'un environnement sain et à l'adoption de mesures préventives contre la maladie.

90. Les services de santé jouent aussi un rôle important dans l'identification des problèmes qui se posent en matière de protection à l'intérieur d'un camp ou autre lieu d'installation. Le personnel de santé a connaissance des problèmes de protection quand des femmes victimes de violences sexuelles ou autres sévices demandent des soins médicaux. Les agents de santé communautaires visitent en général les foyers de réfugiés et peuvent, au cours de leur travail, avoir connaissance de problèmes particuliers. Toutefois, rares sont ceux qui reçoivent une formation sur ce qu'il convient de faire lorsqu'ils découvrent ces problèmes.

91. La santé des femmes réfugiées et de leur famille peut avoir à souffrir de services de santé inadéquats ou dont l'accès est impossible. L'absence de personnel médical féminin est un des principaux obstacles aux soins de santé, en particulier quand des valeurs culturelles empêchent une femme d'être examinée par un homme qui ne fait pas partie de ses proches.

92. Le fait de ne pas utiliser les réseaux de personnel de santé féminin existant dans les communautés de réfugiés a été l'origine de divers problèmes. Par exemple, plusieurs programmes ont formé des hommes réfugiés aux fonctions de médecin, puis se sont rendu compte que ce personnel, une fois formé, quittait les camps. Certains s'étaient installés à l'étranger; d'autres avaient été recrutés pour prêter leurs services dans les forces armées.

93. En revanche, les agents de santé féminins tendent non seulement à mieux convenir à la tâche mais aussi à être des membres plus stables de la communauté. Le recrutement de femmes réfugiées comme agents de santé est donc essentiel au fonctionnement des services de santé. Les organismes qui attachent beaucoup de prix à l'alphabétisation et aux connaissances d'anglais des réfugiés qu'ils emploient, devront peut-être modifier leurs critères de recrutement des agents de santé si le nombre des femmes répondant à ces critères est insuffisant. Il leur faudra peut-être aussi remanier leurs programmes de formation pour y faire une place plus grande à l'alphabétisation, et mettre au point des mécanismes pour convaincre les chefs des réfugiés, en particulier quand la prise d'un travail à l'extérieur du foyer se heurte à des obstacles culturels, que les femmes devraient devenir agents sanitaires. Il faudra aussi recruter davantage de femmes expatriées et de personnel féminin du pays d'accueil, en particulier pour les postes comportant une supervision de personnel féminin issu des rangs des réfugiés ou un contrôle des consultations destinées aux femmes.

94. Un autre problème concerne les types de services offerts. Les services de santé existants méconnaissent trop souvent les besoins propres aux femmes. Par exemple, les services de gynécologie sont souvent insuffisants, de même que les conseils donnés en matière d'espacement des naissances. Des choses de première nécessité sont négligées (linge en quantité suffisante pour les femmes ayant leurs règles et installations pour le laver par exemple); de graves problèmes comme les infections ou le cancer du col de l'utérus et des pratiques néfastes comme l'excision passent inaperçus. Les services de consultations sur les maladies sexuellement transmissibles sont généralement insuffisants, tant pour les femmes que pour les hommes. Rares sont les programmes, s'il en est, qui mettent l'accent sur les besoins des adolescentes, même si les mariages et grossesses précoces sont souvent signalés comme étant la cause d'un mauvais état de santé.

95. L'accès à l'information sur la planification de la famille et les moyens anticonceptionnels est limité dans la plupart des camps de réfugiés, même s'il est offert aux femmes et aux hommes du pays d'accueil. Dans certains cas, les réfugiés hésitent à recourir au contrôle des naissances pour des raisons d'ordre culturel ou par manque d'expérience. Dans un certain nombre de camps, des organismes non gouvernementaux fournissent des services de santé, notamment en matière de santé maternelle et infantile et d'éducation sanitaire, mais ne peuvent, pour des raisons religieuses ou culturelles qui leur sont propres, inscrire la planification familiale à leurs programmes. Il arrive que les femmes réfugiées ne soient pas suffisamment informées pour consentir en pleine connaissance de cause au contrôle des naissances.

96. Le fait que les programmes de santé soient mal conçus s'oppose à leur bonne utilisation par les femmes réfugiées. Bien que la programmation de la prévention soit censée dominer les systèmes de soins de santé, nombreux sont ceux qui restent axés sur les services curatifs.

97. Dans de nombreux cas, les hommes constituent la majorité des personnes hospitalisées. Certains lits d'hôpitaux sont utilisés de façon presque exclusive par des soldats retournés auprès de leur famille dans des camps de réfugiés parce qu'ils ont été blessés ou sont atteints de maladies comme le paludisme. Cette utilisation des services de soins de santé se fait au détriment du travail de prévention qui permettrait d'améliorer l'état de santé des femmes réfugiées.

98. Outre les problèmes de santé physique, un certain nombre de femmes réfugiées ont des problèmes de santé mentale. Devenir réfugié entraîne beaucoup de bouleversements et de changements d'existence brutaux. Les femmes réfugiées sont à tout le moins confrontées à des problèmes émotionnels et à des difficultés d'adaptation provoquées par la disparition du soutien que leur apportaient leur famille et la communauté.

99. Il n'est pas rare que des problèmes mentaux plus graves surgissent par suite d'actes de torture ou de violences sexuelles perpétrés avant ou après la fuite des femmes réfugiées. Ces expériences sont souvent suivies de dépression et de stress post-traumatique. Les symptômes le plus communément observés chez les personnes qui survivent à des événements traumatisants comprennent l'anxiété, les idées qui viennent malgré soi interrompre le cours des pensées, la dissociation ou l'hébétement, l'hypervigilance et les troubles du sommeil et de la nutrition. Les troubles mentaux les plus graves chez les réfugiés pourront se manifester par un comportement dépressif grave, un comportement autodestructeur, un comportement violent ou perturbateur, l'alcoolisme ou l'abus de drogues, et par de graves troubles psychosomatiques.

100. Bien que de nombreuses femmes réfugiées soient victimes de viol, les programmes de consultations dans ce domaine, ou leurs équivalents culturels, sont peu nombreux. Les autres services de santé mentale n'existent pas davantage dans la plupart des camps de réfugiés, pas plus d'ailleurs que les programmes de consultations auxquels pourraient faire appel les femmes qui ont subi le trauma d'un bouleversement.

101. Certains problèmes logistiques entravent aussi l'accès des femmes réfugiées aux soins de santé. Des heures d'ouverture des dispensaires peu pratiques peuvent les empêcher de se rendre dans les services de santé ou d'y amener leurs enfants. D'autres tâches exigeant beaucoup de temps limitent aussi leur possibilité d'aller et venir. Les dispensaires sont parfois trop éloignés des lieux d'hébergement. La crainte de l'insécurité peut aussi en empêcher l'accès. Dans certains camps, les femmes hésitent à se rendre dans les dispensaires car elles doivent, pour ce faire, traverser des zones peu sûres.

Interventions possibles au titre des programmes

102. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes :

  • Consulter les femmes réfugiées pour élaborer des programmes de santé qui tiennent compte de leurs besoins et qui leur garantissent un accès égal aux services prévus.

  • Conclure, avec des organismes mettant en oeuvre des programmes de santé, des contrats et des accords stipulant que le sexe du personnel de santé devra être le même que celui de la population de réfugiés ciblée.

  • Elaborer des programmes pour le recrutement et la formation de femmes réfugiées comme agents de santé.

  • Donner au personnel de santé, notamment aux personnes appelées à travailler en faveur des réfugiés, une formation qui les aidera à déceler les problèmes de la protection et à savoir à qui les signaler.

  • Accorder un rang de priorité élevé à la fourniture de soins de santé primaires - services de santé maternelle et infantile, services de gynécologie et d'obstétrique, consultations sur les maladies sexuellement transmissibles, programmes de planification de la famille - à l'éducation en matière de santé publique et de pratiques néfastes, comme l'excision. Une attention particulière doit être portée aux services dont les adolescentes ont besoin.

  • Créer des services d'orientation et de santé mentale pour les femmes réfugiées, notamment celles qui ont été victimes d'actes de torture, de viol et autres violences physiques et sexuelles.

F. Education et formation

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

103. Le droit à l'éducation est universel. Il est dit expressément dans la Déclaration universelle des droits de l'homme que « toute personne a droit à l'éducation. L'éducation doit être gratuite, au moins en ce qui concerne l'enseignement élémentaire et fondamental ». La Convention de 1951 relative au statut des réfugiés stipule que « les Etats contractants accorderont aux réfugiés le même traitement qu'aux nationaux en ce qui concerne l'enseignement primaire ». Le Comité exécutif du HCR a réaffirmé le droit fondamental des enfants réfugiés à l'enseignement et, à sa trente-huitième session, a exhorté tous les Etats, individuellement et collectivement, à intensifier leurs efforts afin de garantir à tous les enfants réfugiés l'accès à un enseignement primaire de qualité. Pourtant, le droit à l'éducation continue à ne pas être pleinement respecté.

104. Des millions d'enfants réfugiés ne reçoivent pas d'instruction, même au niveau élémentaire. En 1987, moins de 500 000 enfants, sur un nombre estimatif de 5 millions à bénéficier d'une assistance du HCR, fréquentaient des écoles. La scolarisation est faible en comparaison de celle de la population voisine du pays d'accueil ou du pays d'origine. La situation des filles est particulièrement mauvaise : il semble bien que, dans plusieurs pays, les filles réfugiées bénéficient, beaucoup moins que les garçons, des programmes d'enseignement dispensé à tous les niveaux (de l'école primaire à l'université).

105. Même lorsque les enfants réfugiés ont accès à des écoles, les classes sont souvent surpeuplées. La pénurie d'enseignants est un autre problème. Souvent, les enseignants n'ont pas la formation qui convient et le personnel national qualifié n'est pas assez nombreux, même pour les besoins du pays. Les enseignantes sont souvent sous représentées dans les écoles destinées aux réfugiés, ce qui s'explique parfois par le petit nombre de femmes ayant eu accès à l'éducation dans le pays d'origine.

106. Pour les réfugiés, les possibilités de faire des études secondaires et universitaires sont limitées pratiquement partout. Dans beaucoup de pays d'accueil, la politique appliquée en matière d'admission des réfugiés influe sur l'accès à l'enseignement secondaire. Le HCR administre des programmes de bourses d'études qui permettent à un petit nombre de réfugiés d'avoir accès à l'enseignement supérieur. Selon un rapport paru en 1984 sur le programme de bourses du HCR pour des études des deuxième et troisième cycles, les bourses sont en général accordées à des étudiants célibataires, du sexe masculin. La plupart des bourses d'études ne prévoyant pas d'aide pour les personnes à charge, il est difficile aux femmes ayant des enfants de se porter candidates.

107. L'accès des femmes réfugiées aux programmes de formation professionnelle pose également des problèmes. Souvent, les situations de réfugiés exigent de nouvelles qualifications et professions pour les femmes. Le savoir-faire que les femmes apportent avec elles n'est pas immédiatement ou directement applicable à la vie qu'elles mènent dans les camps ou les zones d'installation de réfugiés. Bien que beaucoup de leurs compétences puissent être transférées, les femmes réfugiées ont souvent besoin d'une formation pour assumer le nouveau rôle qu'elles doivent jouer pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.

108. Les femmes réfugiées rencontrent souvent les mêmes obstacles à l'éducation et à la formation que les enfants : insuffisance des ressources, des enseignants et des locaux. Il s'y ajoute d'autres obstacles. Le poids de leur culture empêche parfois les femmes d'accepter un travail ou de suivre une formation hors de leur foyer. Leur culture peut aussi restreindre les types d'activités considérés comme convenant aux femmes. Des problèmes pratiques limitent aussi les inscriptions : obligation de faire garder les enfants pendant la journée, manque de temps et d'énergie une fois accomplies les tâches domestiques et/ou les tâches liées à un emploi salarié. De même, de nombreux programmes de formation supposent un certain niveau d'instruction préalable, fonction surtout de l'alphabétisation. Les femmes réfugiées peuvent ne pas remplir les conditions requises pour en bénéficier parce qu'elles ont fait l'objet, dans leur pays d'origine, d'une discrimination dans l'accès à l'enseignement primaire.

109. D'autres limitations concernent la conception et le contenu des programmes de formation. Dans certains cas, les programmes étaient beaucoup trop éloignés des activités quotidiennes des femmes réfugiées et ne répondaient donc pas à leurs besoins. D'autres programmes de formation professionnelle mettaient l'accent sur des qualifications sans valeur marchande dans une situation de réfugiés.

Interventions possibles au titre des programme

110. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes :

  • S'assurer que les filles réfugiées ont les mêmes possibilités que les garçons d'accéder à l'enseignement primaire offert par le HCR. Quand les réfugiés sont scolarisés par l'administration nationale, veiller à ce que les filles accèdent à l'enseignement, au même titre que les garçons, dans les limites fixées par la politique nationale de l'enseignement. Le cas échéant, mettre sur pied des programmes pour aider les fillettes et jeunes filles réfugiées à surmonter les obstacles qui les empêchent de tirer profit des programmes d'enseignement.

  • Evaluer les programmes pour les bourses d'études du deuxième cycle et d'études universitaires, les programmes d'éducation des adultes et les programmes de formation professionnelle et y apporter les changements nécessaires pour que les femmes réfugiées y accèdent sur un pied d'égalité. Elaborer des projets pour aider les femmes à surmonter les obstacles, notamment ceux que constituent les soins à donner aux enfants - qui les empêchent de tirer profit des programmes d'enseignement et de formation.

  • Consulter les femmes réfugiées sur l'élaboration et l'exécution de ces programmes.

G. Activités

Problèmes/besoins qui peuvent surgir

111. Nombre de femmes réfugiées ont, entre autres besoins essentiels, celui de disposer d'un revenu suffisant pour subvenir aux besoins de leur famille. L'importance économique des femmes réfugiées a souvent été sous-estimée. Si les stratégies domestiques pour la survie économique diffèrent grandement, l'importance du rôle économique des femmes est la même en toute situation. Les obstacles à surmonter pour pouvoir assumer ce rôle économique mettent les femmes réfugiées dans l'impossibilité de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille et favorisent de ce fait leur exploitation possible.

112. Les stratégies domestiques pour la survie économique dépendent de la composition de la famille, des possibilités d'emploi existantes, des traditions culturelles des réfugiés et du pays d'accueil et d'autres facteurs encore. Les femmes réfugiées dans les pays en développement (à l'instar des femmes du pays d'accueil) sont pleinement intégrées aux activités économiques de la famille, qu'il s'agisse de production alimentaire, de commercialisation ou de services telles la préparation d'aliments et la lessive pour d'autres membres de la famille qui exercent des activités rémunérées.

113. En théorie, les réfugiés disposent de plusieurs moyens pour compléter les revenus du ménage : l'emploi dans l'économie locale ou auprès d'organismes d'assistance; les activités agricoles; le troc; la création de commerces ou de petites entreprises et la participation à des programmes de formation professionnelle ou à des projets officiels d'activités génératrices de revenus.

114. Les femmes des pays en développement trouvent le plus souvent un emploi dans le secteur non officiel de l'économie. Les femmes réfugiées dans ces pays font de même. En général, les emplois que les femmes réfugiées occupent sur le marché local relèvent du secteur des services. Par exemple, il n'est pas rare de voir une femme réfugiée subvenir aux besoins de sa famille en travaillant comme domestique. Ces emplois sont souvent la pierre angulaire de la stratégie de survie économique d'une famille élargie.

115. Les organismes d'assistance sont une importante source d'emploi pour les réfugiés dans les pays en développement. En général, ces emplois sont attribués à des hommes plutôt jeunes qui ont des connaissances linguistiques suffisantes pour communiquer et entretenir des relations avec le personnel expatrié chargé des opérations. Ces postes assurent souvent aux réfugiés des revenus plus élevés que ceux qu'ils peuvent percevoir sur le marché local; un travail relativement intéressant, non manuel (même si les employés ont souvent l'impression qu'ils sont surqualifiés pour le poste qu'ils occupent); davantage de sécurité; un statut plus élevé et d'autres avantages parmi lesquels des chances accrues d'être réinstallés dans un pays tiers.

116. Pour les femmes réfugiées, le principal secteur d'emploi dans les organismes d'assistance est celui de la santé. Dans certaines cultures, il est plus convenable pour les femmes de se faire soigner et examiner par d'autres femmes. Les femmes qui occupent un emploi travaillent dans le cadre des programmes d'alimentation d'appoint; comme aides-accoucheuses traditionnelles; dans le cadre de programmes de santé maternelle et infantile; comme visiteuses à domicile, en particulier pour les programmes d'éducation de santé publique et pour le service mobile; comme interprètes; etc. Après les programmes de santé, le deuxième secteur d'emploi est celui des projets générateurs de revenus, en particulier ceux qui visent spécialement les femmes. Toutefois, même dans ces domaines-là, les femmes réfugiées tendent à être sous-représentées.

117. Le HCR et les ONG ont mis en oeuvre de nombreux programmes pour favoriser les activités génératrices de revenus exercées par les femmes. Plusieurs difficultés ont nui au succès de ces entreprises. En général, elles portaient sur des secteurs économiques marginaux, tel l'artisanat pour lequel il n'existe pas toujours un marché viable. D'une manière générale aussi, on n'a pas fait participer les femmes à certains des projets plus vastes portant essentiellement sur le reboisement, le développement des infrastructures ou l'agriculture. Il est intéressant de noter que, dans de nombreuses cultures d'origine des femmes réfugiées, les femmes participent traditionnellement à ces activités; on peut donc se demander si les préjugés occidentaux quant au rôle traditionnel de la femme ne poussent pas à certains choix.

118. Rares ont été les projets destinés aux femmes qui ont débouché sur une autosuffisance économique à long terme des intéressées. Les programmes présentaient les lacunes suivantes : manque de clarté des objectifs; absence de planification adéquate (évaluation des qualifications, études de marché, détermination du bon profil des participants, etc.); frais d'administration excessifs ou financement insuffisant, ou les deux à la fois; délais peu réalistes; enfin, consultation insuffisante de la communauté de réfugiés. Ces programmes montrent toutefois que les femmes réfugiées tiennent à augmenter leurs revenus et qu'elles participeront à des activités économiques hors du foyer si on leur en donne la chance.

119. Chaque fois que les femmes réfugiées n'ont pas de possibilité d'exercer des activités génératrices de revenus, elles sont exposées à l'exploitation et aux violences sexuelles. Les femmes réfugiées qui se livrent à la prostitution font souvent remarquer qu'elles n'ont pas d'autres moyens de subvenir à leurs besoins et/ou à ceux de leur famille. En pareil cas, les lacunes des systèmes d'assistance et d'action sociale sont à l'origine d'importants problèmes de protection pour les femmes réfugiées.

Interventions possibles au titre des programmes

120. On trouvera ci-après un résumé des interventions possibles au titre des programmes

  • Etre conscient de la relation directe existant entre un revenu suffisant et la protection des femmes réfugiées.

  • Garantir l'égalité d'accès des femmes réfugiées aux programmes conçus pour renforcer l'indépendance économique. Veiller à ce que des préjugés culturels personnels ne puissent faire obstacle à l'aide qui permettrait aux femmes réfugiées de devenir totalement autosuffisantes.

  • Consulter les femmes réfugiées sur la conception et la mise en oeuvre de ces programmes.

  • Intégrer les femmes réfugiées dans tous les plans d'aide aux réfugiés et de développement. Il convient toutefois de mettre en oeuvre des projets ayant pour groupe-cible les femmes réfugiées quand il y a à surmonter des obstacles culturels ou autres qui ne touchent pas les hommes de manière égale.

  • Suivre attentivement les projets afin de faire en sorte qu'ils assurent un revenu familial suffisant et ne soient pas axés sur des activités économiques marginales.

SECTION V : MESURES DE SUIVI ET COMMENT SIGNALER LES PROBLEMES LIES A LA PROTECTION

A. Introduction

121. Même si les diverses recommandations contenues dans les Lignes directrices sont appliquées, les problèmes liés à la protection des femmes, des adolescentes et des fillettes réfugiées ne disparaîtront vraisemblablement pas pour autant. On peut distinguer deux sortes de problèmes : premièrement, lorsqu'il est porté atteinte à la sécurité des femmes réfugiées ou qu'elles sont soumises à des violations de leurs droits; deuxièmement, quand l'on découvre que l'on pratique certaines formes de violences ou de discrimination à l'encontre des femmes réfugiées. Ces deux types de situation exigent que des mesures soient prises pour remédier au problème. Le délégué ou le chargé de mission du HCR dans le pays intéressé et le siège du HCR devraient être informés de la nature exacte des problèmes identifiés.

B. Planification de la solution

122. Plus la stratégie adoptée pour prévenir et résoudre les problèmes liés à la protection sera précise et concrète, mieux cela vaudra. Il faudra établir un plan visant à renforcer la protection, en indiquant si le problème traité n'est apparu que dans un seul cas (autrement dit, s'il touche une femme particulière) ou s'il est susceptible de s'inscrire dans un schéma d'événements qui affectent ou affecteront d'autres femmes réfugiées également. Selon la réponse qui sera donnée à cette question, la planification variera considérablement en ce qui concerne :

  • les objectifs précis du plan;

  • les groupes cibles, les lieux où se dérouleront les activités de protection et le nombre estimé des bénéficiaires;

  • la nature exacte de la stratégie proposée;

  • les mécanismes d'application et les responsables chargés de l'exécution;

  • les spécialistes et autre personnel nécessaires pour mener les activités;

  • l'établissement des responsabilités et les arrangements en matière de contrôle de l'application et d'évaluation des résultats;

  • le calendrier précis des opérations;

  • le coût de la mise en oeuvre de la stratégie;

  • la nécessité d'entreprendre des démarches officielles auprès des autorités du pays d'accueil; et

  • la nécessité de faire participer le siège du HCR au plan d'action

123. Il est important de garder à l'esprit que des cas de protection différents exigeront peut-être des solutions sensiblement différentes en fonction des circonstances. Les Lignes directrices doivent suggérer les voies générales à suivre, mais ne sauraient remplacer l'évaluation des activités précisément exigées dans un cas particulier, ni ces activités elles-mêmes.

C. Cas individuels

124. Quand on identifie des cas réclamant une protection spécifique, comme le viol d'une femme, les activités du HCR devraient viser à faire en sorte que l'intéressée bénéficie d'une protection à l'avenir, que des mesures appropriées soient prises pour prévenir des cas semblables, que les besoins médicaux et autres découlant du problème rencontré soient satisfaits en ce qui concerne la femme en question et que les dispositions nécessaires soient prises pour engager des poursuites judiciaires si l'on peut réunir suffisamment de preuves. Il conviendrait d'envisager les activités suivantes :

  • Fournir un cadre dans lequel les femmes réfugiées puissent faire état des problèmes liés à leur protection, dans un entretien privé et avec l'assurance que leur geste ne se retournera pas contre elles.

  • Obtenir autant de renseignements que possible sur les circonstances de l'affaire : identité de la victime, de la personne ou des personnes accusées d'être à l'origine du problème, date et lieu de l'événement, témoins éventuels, etc. Les entretiens devraient être conduits par un personnel qualifié, et la victime et les témoins de sexe féminin devraient être interrogés par des femmes dans toute la mesure possible. Il convient de garder à l'esprit qu'il ne s'agit pas de faire le procès de la personne accusée d'être à l'origine du problème, mais qu'il faut essayer d'éclaircir suffisamment les circonstances de l'affaire pour définir quelles mesures il conviendrait éventuellement de prendre.

  • Déterminer si la victime a besoin d'une aide médicale et/ou de conseils et l'orienter vers les services appropriés.

  • Assurer le caractère confidentiel des renseignements fournis.

  • Déterminer si la victime est maintenant hors de danger et en sécurité.

  • Si elle subit encore des violences, prévoir de la réinstaller ailleurs. S'il est nécessaire de la réinstaller à l'extérieur du camp ou même hors des frontières du pays d'asile, examiner si la femme remplit les conditions requises pour une éventuelle réinstallation dans le cadre d'un programme destiné aux femmes particulièrement exposées.

  • Si la (les) personnes) accusée(s) d'être à l'origine du problème lié à la protection travaillent) à l'intérieur du camp, porter cette question à l'attention du service qui (les) emploie, afin d'examiner les moyens qui permettraient d'empêcher que le fait ne se reproduise.

  • Si la (les) personnes) accusée(s) d'être à l'origine du problème lié à la protection est (sont) un (des) ressortissants) du pays d'accueil (par exemple des militaires ou des résidents locaux), informer de l'accusation le délégué ou le chargé de mission du HCR dans le pays intéressé, de façon à ce qu'il (elle) puisse porter la question à l'attention des autorités du pays d'accueil afin d'examiner les moyens possibles d'assurer une protection à la victime et d'empêcher que le fait ne se reproduise.

  • Si l'on peut recueillir suffisamment de preuves pour engager des poursuites judiciaires contre la personne accusée, informer le pays d'accueil de ces éléments de preuve et demander que des poursuites soient engagées.

D. Problèmes de protection se produisant de façon systématique

125. Lorsqu'il apparaît que la sécurité ou les droits des femmes réfugiées font systématiquement l'objet de violations, les mesures prises par le HCR devraient non seulement porter sur les éléments exposés ci-dessus à propos des cas individuels, mais aussi tendre à dégager et à réduire les causes systémiques des problèmes permanents en matière de protection. Cela suppose :

  • de procéder à une évaluation systématique des politiques et pratiques en vigueur dans le camp pour déterminer si ces politiques contribuent à l'apparition des problèmes de protection, et d'introduire les changements nécessaires pour empêcher de nouvelles violences;

  • de mettre en place des programmes de formation à l'intention des responsables du HCR, des membres des ONG, des autorités du pays d'accueil et de la communauté des réfugiés, afin de les sensibiliser davantage aux droits des femmes réfugiées et de les rendre plus conscients des responsabilités qui leur incombent en matière de protection des femmes réfugiées;

  • de créer des programmes d'aide à l'éducation destinés aux femmes réfugiées pour les informer de leurs droits et des recours dont elles disposent si leurs droits sont violés;

  • d'entreprendre des démarches auprès de ceux qui sont chargés de l'élaboration des politiques et de la mise en oeuvre des programmes, notamment de demander fermement aux autorités des pays d'accueil de prendre des mesures visant à renforcer la protection des femmes réfugiées; et

  • de tenir des consultations avec les ONG pour les informer des problèmes identifiés et obtenir leur collaboration et leur assistance en vue de trouver des solutions.

E. Comment signaler les cas

126. Les cas individuels relevant de la protection des femmes réfugiées devraient être signalés au siège du HCR par les voies normalement utilisées pour les questions de protection. Ils devraient être mentionnés dans les sections pertinentes des rapports annuels consacrés à la protection des réfugiés. Il convient de noter que la description des problèmes liés à la protection n'appelle pas de section distincte consacrée aux femmes réfugiées. Les questions concernant ces dernières devraient au contraire apparaître dans l'ensemble du rapport.

127. Il conviendrait de demander conseil au siège sur les cas individuels relevant de la protection juridique et physique, pour autant qu'il s'agisse de :

  • cas dans lesquels le bureau extérieur ne dispose pas des informations factuelles nécessaires pour traiter le problème. Par exemple, les cas dans lesquels le bureau extérieur n'est pas en mesure d'apprécier le bien-fondé de la demande présentée par une femme pour obtenir le statut de réfugié, faute de renseignements concernant la situation dans le pays d'origine;

  • cas dans lesquels le bureau extérieur a besoin de conseils concernant l'interprétation correcte à donner à certains éléments de la définition du réfugié (dans les cas de détermination du statut de réfugié) ou à des lois et politiques nationales (par exemple, lorsqu'il faut établir la charge de la preuve ou déterminer les droits de la victime en cas de viol);

  • cas dont n'a pas connu dans le passé le bureau extérieur compétent et qui pourraient constituer des précédents pour le règlement des cas futurs de même nature; et

  • cas nécessitant une intervention du siège pour garantir la sécurité de la femme réfugiée, par exemple en demandant une réinstallation d'urgence.

128. La demande d'assistance présentée au siège à propos d'un cas individuel devrait être accompagnée des renseignements suivants :

  • curriculum vitae succinct comprenant le nom de la personne ou son nom d'emprunt éventuel, la date et le lieu de naissance, la nationalité, l'origine ethnique, la religion et l'appartenance à un parti politique ou assimilé et la condition actuelle de la femme dans le pays d'asile;

  • un résumé du problème contenant tous les faits pertinents, notamment tous les éléments et faits exposés par la femme réfugiée ou des témoins pour appuyer la plainte;

  • une évaluation de la crédibilité des déclarations, en particulier quand elles ne peuvent être corroborées de façon indépendante;

  • un résumé le plus détaillé possible des mesures prises jusque-là; et

  • les différentes solutions que le bureau extérieur étudie déjà.

129. Les problèmes chroniques liés à la protection devraient être signalés au siège dès qu'ils ont été décelés. Il convient à cet égard :

  • de fournir des renseignements précis quant à la nature des problèmes;

  • de préciser le type de conseils et d'assistance requis du siège, notamment toute assistance technique nécessaire pour traiter les problèmes liés à la protection qui découlent de la configuration et de la conception du camp et/ou des politiques d'assistance; et

  • de fournir des renseignements détaillés sur les mesures envisagées pour résoudre les problèmes qui ont été identifiés, et notamment leurs incidences financières éventuelles.


1 Voir, par exemple, la conclusion No 39 (XXXVI) de 1985, dans laquelle le Comité exécutif, notamment :

« h) Recommande aux Etats, tant individuellement que collectivement ainsi qu'en coopération avec le HCR, de redéfinir et de réorienter les programmes actuels ou d'en créer si besoin est afin de répondre aux problèmes spécifiques des femmes réfugiées, en particulier pour assurer leur sécurité physique ainsi que l'intégrité de leur personne et leur garantir une égalité de traitement. Les femmes réfugiées doivent participer à la mise au point et à l'application de ces programmes;

j) Demande au Haut Commissaire de présenter régulièrement un rapport aux membres du Comité exécutif sur les besoins des femmes réfugiées et sur les programmes existants et projetés en leur faveur;

k) Reconnaît que les Etats, dans l'exercice de leur souveraineté, sont libres d'adopter l'interprétation selon laquelle les femmes en quête d'asile soumises à des traitements cruels ou inhumains pour avoir transgressé les coutumes de la communauté où elles vivent peuvent être considérées comme appartenant à un 'certain groupe social' aux termes de l'article premier, A.2) de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés. »

Voir aussi la conclusion No 54 (XXXIX) de 1988, dans laquelle le Comité exécutif reconnaît les besoins spéciaux des femmes réfugiées en matière d'assistance, de protection et de solutions durables, demande le renforcement des mesures préventives prises afin d'accroître leur sécurité physique; prie le Haut Commissaire de prendre de nouvelles mesures efficaces visant à réaliser l'intégration des questions relatives aux femmes à tous les stades du cycle de planification des programmes et demande la création d'un comité directeur actif de haut niveau chargé de coordonner, intégrer et superviser le processus à tous les niveaux du HCR. Ce comité a été créé; il s'agit du Comité consultatif pour les femmes réfugiées

Voir encore, par exemple, la conclusion No 60 (XL) de 1989

2 Voir, par exemple, la conclusion No 39 (XXXVI) de 1985, dans laquelle le Comité exécutif, notamment :

« h) Recommande aux Etats, tant individuellement que collectivement ainsi qu'en coopération avec le HCR, de redéfinir et de réorienter les programmes actuels ou d'en créer si besoin est afin de répondre aux problèmes spécifiques des femmes réfugiées, en particulier pour assurer leur sécurité physique ainsi que l'intégrité de leur personne et leur garantir une égalité de traitement. Les femmes réfugiées doivent participer à la mise au point et à l'application de ces programmes;

j) Demande au Haut Commissaire de présenter régulièrement un rapport aux membres du Comité exécutif sur les besoins des femmes réfugiées et sur les programmes existants et projetés en leur faveur;

k) Reconnaît que les Etats, dans l'exercice de leur souveraineté, sont libres d'adopter l'interprétation selon laquelle les femmes en quête d'asile soumises à des traitements cruels ou inhumains pour avoir transgressé les coutumes de la communauté où elles vivent peuvent être considérées comme appartenant à un 'certain groupe social' aux termes de l'article premier, A.2) de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés. »

Voir aussi la conclusion No 54 (XXXIX) de 1988, dans laquelle le Comité exécutif reconnaît les besoins spéciaux des femmes réfugiées en matière d'assistance, de protection et de solutions durables, demande le renforcement des mesures préventives prises afin d'accroître leur sécurité physique; prie le Haut Commissaire de prendre de nouvelles mesures efficaces visant à réaliser l'intégration des questions relatives aux femmes à tous les stades du cycle de planification des programmes et demande la création d'un comité directeur actif de haut niveau chargé de coordonner, intégrer et superviser le processus à tous les niveaux du HCR. Ce comité a été créé; il s'agit du Comité consultatif pour les femmes réfugiées

Voir encore, par exemple, la conclusion No 60 (XL) de 1989

3 A/AC.96/754

4 EC/SCP/59

5 Conclusions sur les femmes réfugiées et la protection internationale, par. b), document A/AC.96/760