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Des Palestiniens de Bagdad espèrent que l'Inde ne sera qu'une étape

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Des Palestiniens de Bagdad espèrent que l'Inde ne sera qu'une étape

Environ 200 réfugiés palestiniens, qui ont fui l'Iraq en 2006, rencontrent des difficultés d'apprentissage de la langue et des différences culturelles en Inde. Ils espèrent trouver un autre pays pour une réinstallation durable.
3 Janvier 2008 Egalement disponible ici :
Un enfant palestinien dans l'appartement de sa famille à Delhi. A Delhi, la barrière linguistique force de nombreux Palestiniens à rester à la maison.

DELHI, Inde, 3 janvier (UNHCR) - La publicité « Incredible India », massivement télédiffusée, a peut-être attiré des millions de touristes dans le sous-continent indien. Cependant, un petit groupe de visiteurs espère que l'Inde restera une étape plutôt qu'une destination en elle-même.

Quelque 200 réfugiés palestiniens d'Iraq ont commencé à arriver en Inde en mars 2006. Sous le régime de Saddam Hussein en Iraq, ils avaient reçu protection et assistance et ils avaient pu bénéficier de conditions de vie agréables, considérées comme injustes par certaines parties de la population iraquienne.

Peu après l'invasion des Etats-Unis en Iraq en 2003, les Palestiniens ont été visés. Ils ont subi des évictions forcées, des menaces de mort et des assassinats à Bagdad. Nombre d'entre eux sont partis pour chercher refuge dans des pays voisins, en Jordanie et en Syrie, mais ils se sont retrouvés bloqués dans des camps à la frontière au milieu d'un environnement hostile.

Une poignée d'entre eux a même fini par retourner en Iraq, pour fuir à nouveau d'importantes tensions sectaires et ethniques, après une attaque menée contre une mosquée chiite dans la ville de Samarra début 2006.

« Mon mari et moi travaillions pour le Gouvernement iraquien. Nos enfants allaient à l'école et notre vie était agréable », se souvient Khawala, une réfugiée palestinienne âgée de 55 ans. « Mais, après la guerre [de 2003], tout a changé. Il y avait des milices et des combats entre Sunnites et Chiites. Ils ont commencé à faire des différences entre les nationalités - qui est Iraquien, qui est Palestinien. De nombreuses personnes ont été tuées et ma famille a été visée par les milices qui voulaient notre départ. »

Son fils Alar a été le premier à partir, après avoir survécu à deux mois de torture dans une prison de Bagdad. « Quand je suis sorti [de prison], j'ai reçu des lettres de menace contenant des balles de revolver », a-t-il expliqué. « J'ai fui vers la Syrie, mais je ne pouvais pas y rester car j'avais un faux passeport. Le passeur nous a dit qu'il allait nous emmener plus loin. Je pensais que l'Inde serait une étape. Je ne m'attendais pas à y rester. »

D'autres disent qu'ils ont été dupés et abandonnés en Inde. Néanmoins, ils ont trouvé un pays d'où ils ne seraient pas expulsés de force. Alors ils ont demandé à leurs familles de les rejoindre, lorsque la situation à Bagdad s'est à nouveau détériorée.

Aujourd'hui, la famille d'Alir, qui compte sept membres, vit dans un appartement de deux pièces, dans une zone défavorisée située au sud de Delhi. Khawala est la seule personne qui gagne un salaire, elle travaille en tant qu'employée aux services communautaires dans une crèche pour enfants au Centre Kishengarh pour les réfugiés palestiniens. « Les Indiens sont gentils mais ils me dévisagent car je porte un voile », a-t-elle dit. « Mes fils ne peuvent pas travailler à cause de la barrière linguistique. L'hindi est une langue difficile à apprendre. Nous n'avons pas d'avenir ici et cette situation nous déprime. »

L'agence des Nations Unies pour les réfugiés fournit une allocation mensuelle de subsistance à ces familles et une aide à l'éducation pour leurs enfants. L'agence finance aussi le Centre Kishengarh, qui assure un enseignement en anglais et des activités pour la détente. Les classes en hindi ont été stoppées temporairement, à cause d'un manque d'intérêt. « Pourquoi apprendre l'hindi si nous partons dans un pays occidental ? » demande un réfugié au centre.

Malheureusement, avec plus de deux millions de réfugiés iraquiens au Moyen-Orient et un rapatriement peu envisageable, le petit groupe de Palestiniens de Bagdad, en comparaison, ne constitue pas nécessairement la première priorité pour les pays de réinstallation.

En septembre, le Brésil a accepté d'accueillir environ 100 Palestiniens, qui avaient été bloqués à la frontière pendant plus de quatre ans au camp de Ruweished en Jordanie. Un autre groupe de 2 000 Palestiniens attend toujours dans deux camps situés dans le désert près de la frontière entre l'Iraq et la Syrie. Quelque 13 000 réfugiés palestiniens vivent encore à Bagdad, où ils subissent des intimidations, des évictions forcées et des attaques.

« A Bagdad, je travaillais dans un restaurant et j'étais un étudiant boursier en arabe », a expliqué Mwofak, dans son appartement délabré à Delhi. « En Inde, nous vivons dans la pauvreté. C'est difficile à cause de la barrière linguistique ainsi que des différences de culture et de traditions. »

Sa liste de problèmes est longue : « Nous n'avons pas les moyens de manger plus d'une fois par jour. Mon frère est dans un fauteuil roulant et ne peut pas sortir. Ma femme a eu une embolie cérébrale. Mon fils est tombé dans les escaliers et il se remet maintenant de cette chute. Je suis diabétique et mes blessures ne cicatrisent pas. Quand nous allons à l'hôpital, tout est compliqué et personne ne nous comprend. En même temps, notre propriétaire augmente le loyer et essaie de nous expulser en nous imposant des couvre-feux et en limitant les visites. »

Il explique que sa femme a des proches qui vivent dans un pays européen, où ils espèrent être réinstallés. Khawala, elle aussi, est optimiste : « Nous sommes dans une situation désespérée ; nous n'avons aucune marge de manoeuvre. S'il vous plaît, aidez-nous à trouver bientôt une solution. »

Carol Batchelor, chef de mission de l'UNHCR à New Delhi, a souligné que l'agence « continue à rechercher des solutions pour tous les réfugiés relevant de notre mandat en Inde, et notamment cette population vulnérable. Nous oeuvrons activement pour les personnes dans le besoin, mais les possibilités de réinstallation à travers le monde sont limitées. Et, en fin de parcours, il y a le pays de réinstallation qui décide de qui il va accepter. »

Elle a noté que les réfugiés palestiniens et iraquiens vivant à Delhi sont hautement qualifiés et expérimentés, mais ils n'ont plus d'argent car la majorité d'entre eux ne travaille pas. « Il pourrait se passer beaucoup de temps avant une éventuelle réinstallation pour tous les membres de ce groupe », a expliqué Carol Batchelor. « Parallèlement, il est important qu'ils apprennent la langue locale pour augmenter leurs possibilités d'avoir un revenu. »

On compte plus de 11 400 réfugiés relevant de la protection de l'UNHCR en Inde, la plupart d'entre eux sont originaires d'Afghanistan ou du Myanmar.

Par Vivian Tan à Delhi, Inde