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Togo : 2 000 personnes toujours déplacées

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Togo : 2 000 personnes toujours déplacées

A la suite des violences qui ont suivi les élections présidentielles au Togo en avril dernier, il reste encore plus de deux mille déplacés à l'intérieur du pays, d'après la mission des Nations Unies et les autorités togolaises. Ces déplacés togolais attendent une évolution politique pour faire à nouveau confiance aux autorités.
29 Septembre 2005

TOGO, 29 septembre (UNHCR) - A la suite des violences qui ont suivi les élections présidentielles au Togo en avril dernier, il reste encore plus de deux mille déplacés à l'intérieur du pays, d'après la mission des Nations Unies et les autorités togolaises. Ces déplacés togolais attendent une évolution politique pour faire à nouveau confiance aux autorités.

Martial est l'un d'entre eux. Conducteur de zémidjan (taxi-moto), la quarantaine, il a quitté Lomé avec sa famille. Depuis plus de 4 mois, il se cache dans la ferme de son oncle, à environ 60 km de la capitale, au milieu des plants de maniocs et de maïs. Pour lui, il n'est pas question de rentrer. « Je ne me sens pas rassuré », explique-t-il. « Dans les quartiers, on nous connaît. On ne sait pas ce qui peut nous arriver. »

Actif au sein de l'opposition, il était chargé de la protection de l'un de ses leaders. Le 28 avril, il a fui alors que des hommes en uniforme forçaient les portes de sa maison. Ses biens ont été brûlés et la moto, son outil de travail, emportée. Au-delà du sentiment d'insécurité, ces pertes matérielles prolongent inéluctablement sa situation de déplacé. « Je ne sais pas comment je vais rembourser le propriétaire de la moto et payer le loyer de la maison », s'interroge-t-il.

Avec ses femmes et leurs 6 enfants, Martial est installé dans une pièce de la ferme construite en banco où ont aussi trouvé refuge la famille de son frère et une vieille dame, venue d'Aného, localité au coeur des violences en avril dernier. Dans un coin de la cour égayée par les jeux des enfants, elle est immobilisée. En mina, la langue locale, elle explique qu'elle a été blessée au cours de sa fuite. Sa jambe est gonflée et la plaie sérieusement infectée. Faute de moyens, elle utilise le savoir traditionnel pour se soigner.

« Des personnes souffrent mais par manque de ressources, elle ne se soignent pas comme il faudrait », témoigne un employé de l'OCDI, partenaire opérationnel de l'UNHCR au Togo. Si l'assistance médicale dans la région n'est pas satisfaisante, les structures de santé d'autres localités, par contre, ont été renforcées et certaines procurent des soins gratuits aux déplacés.

Les déplacés rencontrent les mêmes problèmes que les communautés locales : accès à l'eau potable, aux soins de santé, aux médicaments, à l'éducation etc. Compte tenu de la hausse des prix, les déplacés connaissent la faim et les carences nutritionnelles menacent les familles.

Chez son oncle, les conditions de vie sont difficiles mais au moins, Martial a un toit pour protéger sa famille et ils partagent les maigres ressources avec ses hôtes. Il a reçu des vivres et d'autres articles non alimentaires de la part de l'UNHCR et d'autres agences des Nations Unies : riz, huile, maïs, haricots, savon, ustensiles de cuisine, nattes, couvertures, etc.

« Identifier et aider les plus vulnérables n'a pas été chose facile », raconte un responsable de la distribution de l'aide fournie par l'UNHCR et les autres agences humanitaires dans la région. « Par peur, certains ne se sont pas manifestés. Parfois, au péril de leur vie. »

Chargée d'évaluer l'assistance portée aux personnes déplacées et leurs conditions de vie, la mission composée de représentants des Nations Unies et du gouvernement togolais a constaté que la plupart des déplacés au Togo se sont réfugiés dans des communautés avec lesquelles ils partagent des liens de parenté.

Bien intégrés, ils vivent pour la plupart, comme Martial, de la solidarité familiale et tentent de trouver une source de revenu pour améliorer leurs conditions de vie. Certains continuent, à partir de leur lieu d'accueil, à cultiver leurs champs. D'autres se sont mêlés à la population locale pour commencer des cultures.

Si les déplacés arrivent maintenant à gérer leur quotidien, les plaies sont encore douloureuses. L'indicateur encourageant qu'est le retour des déplacés internes ne doit pas faire perdre de vue le sentiment d'insécurité et de méfiance qui règne toujours. Certains n'ont plus rien ni personne chez qui aller. Leur maison a été détruite, leur outil de travail endommagé ou ils ont perdu leur emploi. Pour d'autres, le traumatisme est tel qu'ils préfèrent ne pas retourner là où les souvenirs sont encore vivaces. De même, quelques-uns craignent la vengeance des militants du parti adverse ou estiment simplement trop risqué le retour chez eux car ils doutent encore des garanties de protection promises par les autorités locales.

Estimés à 10 000 par les Nations Unies début mai, « la plupart des Togolais déplacés sont retournés chez eux », confie le chargé de protection de l'UNHCR. Mi-août, une mission conjointe des Nations Unies et du gouvernement togolais a sillonné les régions les plus affectées par les violences qui ont suivi l'élection présidentielle togolaise en avril dernier. Il subsiste encore 2 000 personnes déplacées au Togo.

Malgré la formation d'un gouvernement d'union nationale, les appels au retour du gouvernement et la rencontre à Rome du président Faure Gnassingbé avec le leader de l'opposition radicale, Gilchrist Olympio, bon nombre de déplacés restent méfiants et ne semblent pas prêts à rentrer chez eux.

Par Julie Leduc